La Femme d’Argile et l’Homme de Feu – Hélène Wecker

Résumé : Lorsqu’elle se réveille en cette fin du XIXe siècle, Chava est enfermée dans une malle au fond d’un navire qui les emmène, elle et son nouveau mari, vers New York, loin de la Pologne. Faite d’argile, c’est une golème, créée par un rabbin qui s’est détourné de Dieu pour se consacrer à l’occultisme.
Lorsqu’il se réveille, le djinn est violemment projeté sur le sol de l’atelier d’Arbeely, un artisan syrien. L’instant d’avant, c’est-àdire mille ans plus tôt, cet être de feu aux pouvoirs exceptionnels errait dans le désert.
La golème et le djinn, fantastiques immigrés, se rencontrent au hasard d’une rue. Eux seuls se voient tels qu’ils sont réellement. Chacun sait que l’autre n’est pas humain. Tous deux incapables de dormir, ils se donnent rendez-vous une fois par semaine, la nuit, pour arpenter les rues de Manhattan, qu’ils découvrent avec émerveillement.
Mais une menace plane sur eux. Le créateur de la golème, d’un âge très avancé, est prêt à tout pour échapper à la mort. Et il a vu ou se cachait le secret de la vie éternelle : à New York.

Edition : Robert Laffont

 

Mon Avis : Ce roman a beaucoup fait parler de lui lors de sa sortie aux USA, fortement plébiscité et apprécié au vu des quelques critiques que j’ai vu, j’avais donc hâte de le découvrir. Ce fut donc sans surpris que lorsqu’il a été publié en VF, il a rapidement rejoint ma PAL, même si j’avoue, comme cela arrive parfois, il y a un peu trainer. Concernant la couverture je la trouve franchement sympathique dans son ton et ses choix de couleurs. Il est à noter que ce roman a de nouveau été publié, un an après sa sortie chez Robert Laffont, aux éditions Bragelonne avec une couverture « mois du cuivre » sous le titre, plus proche de la version originale Le Golem et le Djinn.

Ce roman nous emmène ainsi à New York, fin du 19ème siècle, où l’on va suivre et découvrir le destin Chava, une golème qui a perdu son maître quelques heures après sa « naissance » et vient d’arriver en ville, et Ahmad un djinn qui vient par erreur d’être libéré d’une fiole sans se souvenir comment il a pu terminer entravé. Deux êtres perdus, déracinés qui errent dans cette ville en pleine expansion et dont les chemins vont se croiser. On plonge ainsi dans un roman qui va nous offrir un rythme très contemplatif et poétique, prenant le temps de bien poser à la fois ses personnages, son univers ainsi que les notions que l’auteur cherche à soulever. Par conséquent si vous êtes un adepte des récits nerveux, avec de l’action ou avec une certaine tension, il vaut mieux passer votre chemin ce n’est pas du tout le but de ce récit. Pourtant je dois bien avouer qu’une fois la dernière page tournée je n’ai pas eu la « claque » de lecture espérée, même si cela n’empêche pas ce roman de se révéler intéressant  à découvrir et plus que sympathique à lire. J’avais peut-être, au final, un peu trop d’attentes.

Le premier gros point qui m’a happé dans ce roman vient du travail de l’auteur, qu’il soit aussi bien culturel qu’historique, pour rendre son récit clairement prenant, vivant, cohérent et efficace. Je ne sais pas si la ville de New York à l’époque est fidèlement retransmise, mais je sais par contre qu’elle a réussi à la rendre envoutante, attrayante, en pleine évolution et donner envie au lecteur de la découvrir de s’y balader. L’aspect culturel s’avère aussi soigné et dense, que ce soit du point de vue de la communauté syrienne liée au Djinn, comme de la communauté Juive liée au Golem. On sent qu’Hélène Wecker n’a rien voulu laisser au hasard, nous offrant ainsi un contexte riche et plaisant sans tomber dans la caricature. Cela ajoute ainsi au récit une bonne dose de tradition et de mythes parfois « pittoresques » mais socialement intéressants, qui permettent au lecteur de se sentir dépayser, de voyager d’une certaine façon.

Autres aspect très intéressant qui est lié aussi bien à la ville qu’à l’époque, c’est tout ce qui tourne autour de New York, de l’immigration, du contexte de l’époque et l’idée de se lancer dans nouvelle vie. L’auteur soulève ainsi de nombreuses réflexions sur l’importance des choix, le changement, le rêve ou encore les envies de chacun d’entre eux qui a rejoint New York pour y trouver une vie différente, une vie meilleure. Elle traite aussi de l’acceptation des autres, les inégalités ou encore la solitude. Mais c’est aussi une histoire d’adaptation, devoir ainsi s’adapter à tous les bouleversements qu’un tel changement apporte, mais aussi à l’époque qui évolue. Par conséquent le fait d’avoir deux héros « vierge » de toute connaissance de ce monde offre ainsi un sentiment plus puissant et marquant de ce que c’est de voir sa vie complètement chamboulée et de devoir reconstruire.

Les différents personnages croisés au fil des pages ne sont pas non plus en reste et donnent envie d’en apprendre plus sur eux. Que ce soit les deux héros ou bien aussi les personnages secondaires, ils s’avèrent ainsi très intéressant à découvrir et à suivre. L’auteur nous dépeint ainsi des portraits complexes de héros exilés qui sont obligés de se reconstruire et de trouver une nouvelle voie dans un nouveau monde, dont on s’attache assez facilement et rapidement. La vie n’est ainsi pas facile pour eux, entre « l’ancienne » génération encore plongé dans les mythes et les tradition de leurs anciennes vies et la « nouvelle » qui cherche à profiter pleinement des changement apparus. Le couple que constitue la Golème et le Djinn ne manque pas non plus de nous captiver, que ce soit dans leurs façon de voir ce « nouveau » monde, de le gérer, mais aussi dans leurs différentes confrontation, que ce soit entre eux lors de leurs rencontres, mais aussi parfois avec les autres. C’est ainsi leurs façons d’évoluer et d’apprendre, leurs visions du monde qui est aussi en plein bouleversement qui fait qu’on se laisse happer assez facilement par eux avec leurs envies et leurs frustrations. L’auteur construit aussi une relation entre les deux protagonistes efficace et surtout sans jamais tomber dans la guimauve ou l’histoire facile. On est ainsi devant deux héros humains et qui ne laissent pas le lecteur indifférent.

Autres aspect intéressant du livre, c’est la plume de l’auteur qui s’avère à la fois poétique, ciselée, délicate et pourtant simple dans la construction ce qui, je trouve, est une force pour ce récit. Ainsi sans tomber dans un langage trop alambiqué ou dense, elle arrive à créer une ambiance envoutante, qui n’est pas sans rappeler non plus les Milles et une Nuits que ce soit dans les passages du passé du djinn comme dans cette intrigue fil rouge sur le sorcier.  On a ainsi franchement l’impression de lire un conte moderne. Pourtant, quelques points m’ont tout de même dérange dans ce récit, le premier vient que, comme je l’ai dit, on est dans un récit très contemplatif, parfois même de trop. J’ai eu l’impression que l’auteur prenait par moment trop son temps sur la construction de son univers poétique au profit parfois d’élément d’intrigue qui auraient mérité plus de développement, voir moins de simplicité. Autre point, je ne sais pas trop comment l’expliquer mais ce roman ne m’offrait pas ce sentiment de « reviens-y »; de rappel. J’ai aimé me plonger dedans et suivre les aventures qui s’y déroule, mais quand je le posais je n’avais pas ce ressenti plus ou moins pressant qui me pousse à me replonger dans un roman. Peut-être une légère tension ou une légère nervosité supplémentaire dans l’intrigue aurait apporté un plus. Enfin j’ai trouvé la conclusion un peu abrupte et reposant sur certaines facilités, comme si l’auteur était pressé de boucler son récit. Cela n’a pas pour autant empêché cette lecture de s’avérer sympathique et agréable et même si je devais avoir trop d’attentes par rapport aux retours que j’avais vu passer, j’en reconnais ses qualités et je lirai sans soucis d’autres écrits de l’auteur.

En Résumé : Au final même si ce roman n’a pas complètement répondu aux attentes que j’avais en me lançant dans sa lecture, j’ai tout de même passé un très agréable moment de lecture. L’auteur nous plonge ainsi dans un New York du 19ème siècle réaliste, vivant et qui donne envie d’être découvert. On se retrouve à suivre le destin d’une golème et d’un djinn, , héros déracinés et perdus, qui vont se croiser et tenter d’oublier leurs solitudes. On découvre ainsi des personnages soignés, denses humains, que ce soit les héros principaux comme les protagonistes secondaires et on se retrouve à les suivre avec un minimum de plaisir. Mais ce récit traite aussi de sujet important comme la notion d’immigration, l’acceptation de l’autre, les choix que chacun fait ou bien encore la notion de changement très présent à cette époque. J’ai trouvé aussi que la relation entre nos deux héros sonnaient juste, l’auteur la maitrisant parfaitement sans jamais tomber dans le côté guimauve. Le style s’avère ainsi simple, riche, ciselé et poétique, présentant ainsi le récit comme un conte moderne rappelant parfois aussi dans la construction comme dans certains passages Les Mille et une Nuits. Sauf que voilà j’ai trouvé que ce récit possédait quelques longueurs, que la conclusion m’a paru trop abrupte et enfin quand je posais ce livre je n’avais pas cet empressement et cette envie de m’y replonger rapidement dedans comme s’il manquait une légère tension. Cela n’enlève en rien les qualité du récit, surtout qu’il s’agit d’un premier roman, et même s’il n’a pas complètement répondu aux attentes que je pouvais avoir je lirai sans soucis d’autres écrits de l’auteur.

 

Ma Note : 7/10

 

Autres avis : Xapur, Lhisbei, Ptitelfe, nymeria, Koré, …

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Bilan 2016 !

  1. Cette couverture me faisait de l’oeil. Je n’avais pas fait le rapprochement avec la publication chez Bragelonne, d’ailleurs. Il me tente bien! 🙂

  2. Je dois dire que le livre en lui-même ne me tente pas réellement. La faute aux golems, djinns et autres monstres de ce calibre. Je ne sais pas pourquoi, cela ne m’inspire pas. En revanche, ton propos sur l’époque et l’ambiance New Yorkaise dans ce XIX ° me séduit. Et, j’aime pas les récit guimauve, alors c’est aussi un plus.

    Je vais donc voir si je le trouve!

    • Alors le folklore sur les djinn et les golem est bien là, mais ce n’est pas obligatoirement le centre du sujet. A toi de voir, si jamais tu le souhaites je peux en faire un livre voyageur.

  3. J’en ai beaucoup entendu parler, et rien que le titre me donne énormément envie. Et ce que tu dis me motive bien aussi, que ce soit le côté fantastique, le New York du XIXè où les thèmes abordés. Bref, même s’il t’a un peu déçu, tu arrives à me tenter !

    • Déçu, non, pas du tout, je trouve juste qu’il lui manque un petit quelque-chose pour en faire une lecture encore plus marquante. En tout cas j’espère qu’il te plaira, bonne lecture.

  4. Faut que je le lise un jour celui-là !

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