La Fenêtre de Diane – Dominique Douay

la-fenetre-de-dianeRésumé : Aux confins de la galaxie dérive une planète artificielle, Le Livre, dont la fonction est de conserver, tout au long de ses interminables galeries que parcourent les marques-pages, l’histoire de toutes les Terre qui composent la Protée.
Ces déplacements ne sont cependant pas sans risques : en témoignent les fantômes errant dans les profondeurs du Livre, voyageurs imprudents ou intelligences artificielles. Je m’appelle Gabriel Goggelaye et je vis bien longtemps avant qu’on ne découvre Le Livre. Pour moi, il y a une Terre et une seule. Des personnages fantomatiques, il m’arrive d’en voir. Certains obéissent à la Voix, d’autre pas. En face de mon bureau, il y a une fenêtre, et derrière cette fenêtre, il n’y a rien. Un jour, je briserai l’une des vitres et je pénétrerai dans ce lieu qui n’existe pas.

Edition : Les Moutons Electriques

 

Mon Avis : Dominique Douay fait partie de ses auteurs qui ont longtemps marqué la scène de la Science-Fiction française durant les années 70-80 et dont j’avoue ne pas encore avoir lu de ses romans. J’ai bien lu sa nouvelle dans l’anthologie Utopiales 2014, mais elle ne m’avait pas complètement convaincu, mais j’y reviendrai. Après plusieurs années sans publications, l’auteur est revenu avec ce nouveau roman sorti il y a quelques mois. Suite à ma lecture du résumé, qui se révélait intrigant, j’ai donc décidé de faire entrer ce roman dans ma PAL. Concernant la couverture, illustrée par Sebastien Hayez, je trouve qu’elle colle parfaitement à l’ambiance du récit.

Alors je l’annonce tout de suite, il va m’être très difficile de parler de ce roman tant il m’a paru personnel aux yeux de l’auteur que ce soit dans sa construction, mais aussi dans ce qu’il véhicule, et qui pourtant n’a pas réussi à complètement me convaincre. Sur la planète Livre, il est possible de voyager à travers le temps et les différentes terres qu’est la Portée. Le but des habitants de cette planète est de collecter des informations, des récits de vies et d’époques, des différentes terres existantes restant de simples observateurs. Suite à un évènement improbable, trois habitants vont se retrouver coincé sur l’une de ses terres. Ils vont alors se retrouver lié à Gabriel Goggelaye, héros banal, mais qui possède un certain pouvoir latent. Il est difficile de vous proposer un résumé de ce livre, car il va se révéler complexe et surtout son intrigue se dévoile clairement à partir du milieu du récit environ selon moi. En effet l’auteur a décidé de construire son histoire comme un puzzle, que ce soit d’un point de vue temporel, comme d’un point de vue des personnages, le lecteur sautant d’un héros à l’autre et d’une époque à l’autre, demandant ainsi un travail de concentration pour tout remettre en place et dévoiler ainsi la trame qui est construite.

On se rend rapidement compte que Gabriel est plus que ce qu’il parait, mais son rôle est quasiment nébuleux tout du long avant la conclusion. C’est d’ailleurs cette construction qui rend ce livre intéressant à lire et à découvrir je trouve. Les mystères et les questions qu’elle soulève aiguille ainsi le lecteur à tourner les pages pour savoir où veut nous mener Dominique Douay. Mais surtout on découvre ici un roman qui va bien au-delà du simple récit de SF, on sent que l’auteur y a mis beaucoup de lui dans ce livre et surtout il demande un travail du lecteur pour dévoiler les faux-semblants, les différentes couches de l’intrigue et les réflexions soulevées. Cela en bloquera certainement plus d’un et je ne conseillerai pas, selon moi, ce livre à quelqu’un qui souhaiterait découvrir la SF, car il demande un minimum de bagages pour en y voir les références, mais il ne manque pas d’étonner. Je pense d’ailleurs être moi-même passé à côté de certains points. C’est clairement un récit où chaque lecteur y trouvera ses propres idées, ses propres clés, où rien n’est acquis et où des points restent complètement ouverts même une fois la dernière page tournée.

Par contre en tant que lecteur de SF j’y ai retrouvé des thématiques chères au genre, que ce soit le voyage dans le temps, l’altération de la réalité, les souvenirs, la place de chacun ou bien encore le côté un peu paranoïaque de se sentir observé, ou bien encore de cette vérité qui se laisse difficilement apprivoisé. Mais c’est aussi une réflexion, un regard sur notre passé, ce qu’on aimerait y changer et ce qu’on serait capable de réaliser si on pouvait le faire. Une sorte d’atmosphère étrange et dérangeante se dégage ainsi du roman, remettant en cause la réalité du héros et qui, je trouve, colle plutôt bien au récit. Tout cela fait franchement penser à un auteur comme Philip K. Dick, ce qui n’est anodin, car comme le cite le quatrième de couverture Dominique Douay a fortement été influencé par ce dernier et finalement lui rend une sorte d’hommage dans ce roman.

Mais revenons sur ses réflexions qui se dévoilent tout au long, ce côté métaphysique est effectivement intrigant, poussant le lecteur ainsi à se poser des questions sur ce qu’il découvre au fil des pages mais aussi, d’une certaine façon, sur notre société. De plus rien ne paraît laissé au hasard, chaque indice remet en cause cette vérité, questionnant chacun sur cette fameuse terre, notre héros ou encore sur l’Histoire qui parait identique, mais sur certains petits points différe. La narration éclatée joue aussi beaucoup dans cet aspect, cette étrangeté, cette légère angoisse qui s’en dégage. Mais il s’agit aussi de quelque chose de plus intime, je m’avance peut-être, mais j’y ai vu dans ce livre l’idée de la maturation d’un roman, des modifications, des retours, des avancées qu’on peut y faire pour aboutir à ce fameux livre. Cette capacité à l’oeuvre à changer au fil du temps, mais aussi à s’échapper, à gagner son identité propre, modifiant les prémices qui ont été posés. La conclusion m’a d’ailleurs paru coller parfaitement aussi à cette idée, même si comme l’ensemble du roman elle propose plusieurs couches de lectures et où chaque lecteur y verra peut-être quelque-chose de différent..

A côté de cela, ce livre propose aussi quelques originalités très intéressantes, je pense principalement à cette idée de livre, de voyage dans le temps grâce au Marque-page ou encore de Diane que je vous laisse découvrir pour ne pas trop en dévoiler. Et pourtant comme je l’ai dit, j’avoue ressortir pas entièrement convaincu de ce roman. Le premier point qui m’a dérangé c’est que la majorité des souvenirs du héros tourne autour de sa vie sexuelle et de la potentialité des relations qu’il aurait pu avoir. Cela en devient limite un point central. A noter d’ailleurs que toutes les femmes ont l’air de tomber à ses pieds. J’avoue cet aspect de la vie de Gabriel ne m’a pas touché plus que cela. Ensuite, comme je l’ai dit selon moi ce roman se veut très personnel vis-à-vis de l’auteur. On y retrouve des anecdotes ainsi que des éléments qui lui sont liés, sauf que cela m’a rendu  certains passages plutôt hermétiques. Enfin j’avoue que certaines idées, ou certaines notions m’ont paru mal amenés voir amenées de façon trop brusques. J’avais dit que je reviendrai aussi sur la nouvelle de l’anthologie des Utopiales 2014, il s’agit d’un des chapitres du roman ce qui m’a aussi légèrement dérouté, même si là rien de gênant. Au final ce roman est un roman un peu à part, à la fois très personnel et très ambitieux dans ce qu’il cherche à amener et à soulever. Le tout est porté par une plume que j’ai trouvé simple et efficace et même si je n’ai pas complètement accroché, il m’a tout de même paru intéressant à découvrir.

En Résumé : La Fenêtre de Diane est un roman qui se veut à la fois très personnel pour l’auteur, mais aussi ambitieux dans ce qu’il construit. On plonge ainsi dans un récit éclaté aussi bien dans le temps que dans la narration, ce qui pousse le lecteur à assembler les pièces pour en dévoiler la trame finale jouant ainsi avec chacun. Que ce soit le voyage dans le temps, la notion de réalité, de vérité, la place de chacun, le contrôle le tout dans une ambiance qui se veut légèrement angoissante et paranoïaque on y retrouve amené de façon efficace de nombreux thèmes SF ainsi que des axes de réflexions intéressants. De plus ce roman m’a paru, je trouve, une métaphore de la création d’un roman par ces nombreux retours, ces nombreuses modifications, altérations et sa façon de « prendre vie ». J’avoue l’idée m’a accroché. On y trouve aussi quelques idées originale, comme la capacité de voyager dans le temps et l’espace avec un Marque-page. Pourtant, certains points m’ont tout de même dérangés, l’auteur tourne un peu trop sur la vie sexuelle du héros ce qui ne m’a pas trop touché. Ensuite il s’agit ici d’un roman très personnel vis-à-vis de la vie de l’auteur, ce qui le rend parfois un peu hermétique. Enfin certains aspects et certaines idées m’ont paru mal amenés ou de façon trop brusques. La plume de l’auteur s’avère simple, efficace et même si je n’ai pas complètement accroché, j’ai trouvé ce roman intéressant à découvrir.

 

Ma Note : 6/10

 

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Mes Achats du mois de Septembre 2016

  1. J’ai mieux aimé que toi, mais je partage grosso modo ton avis sur les points forts et les points faibles. Sur son rapport à la sexualité, j’ai ressenti le même malaise. Pourquoi toutes les filles tombent à ses pieds ? Je crois simplement que comme Goggelaye agit sur la réalité par le simple pouvoir de sa pensée, il parvient donc à faire que dans cette réalité il soit attirant. Mais au-delà de l’explication qui nous est donnée, je suis d’accord qu’il y a un côté très dérangeant : non seulement toutes les filles tombent à ses pieds, mais en plus il a un rapport presque uniquement sexuel aux femmes. Sans compter que ses fantasmes consistent grosso modo à soumettre des femmes devant lesquelles il s’est retrouvé impuissant lors de ses diverses expériences. Selon moi l’auteur doit être un minimum sexiste pour en arriver à écrire de tels trucs. J’ai préféré ne pas le mettre dans ma chronique pour ne pas soulever un débat là-dessus, d’autant que malheureusement cet auteur est loin d’être le seul à nous servir des clichés sexistes en littérature (ce qui n’excuse rien).
    Mais sinon pour moi c’est un excellent roman, bien travaillé sur les atmosphères et sur le tâtonnement de Goggelaye face à un destin qu’il ne comprend pas. J’ai beaucoup aimé aussi ce côté puzzle que tu décris au début, même si cela a aussi un côté déroutant.

    • Je ne sais pas si il est sexiste, je ne dirai pas obligatoirement que c’est ce qui est recherché, je dirai qu’il ait plus voulu jouer sur le fantasme masculin. Sauf que voilà j’ai trouvé ça étrange et, oui, parfois ca crée un peu un malaise, surtout quand tu le dis il réécrit son histoire sexuelle.
      Après c’est vrai que sur l’ambiance il y a quelque chose qui se dégage, mais voilà je trouve que d’autre romans qui ont les même idée, les ont mieux traité, d’où ma petite déception.

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