L’Adjacent – Christopher Priest

l'adjacentRésumé : En Anatolie, l’infirmière Melanie Tarent a été victime d’un attentat singulier : totalement annihilée, elle n’a laissé au sol, comme seul vestige de son existence, qu’un impossible cratère noir et triangulaire.
De retour en République Islamique de Grande-Bretagne, son mari, le photographe free-lance Tibor Tarent, apprend qu’un attentat a eu lieu le 10 mai à Londres, qu’il a fait cent mille morts, peut-être le double. Là aussi, la vaste zone touchée était inscrite dans un triangle parfait.
Alors qu’il est emmené dans une base secrète afin d’être interrogé sur ce qu’il a observé en Anatolie (globalement rien, en dehors de l’étrange point d’impact), Tibor entend parler pour la première fois du phénomène d’adjacence. Mais à bien y réfléchir, est-ce vraiment la première fois?

Edition : Denoël Lunes D’Encre

 

Mon Avis : Cela fait quelques mois que je me dis qu’il serait peut-être temps de sortir l’un des nombreux romans de Christopher Priest qui sont coincés dans ma PAL, surtout que le premier roman que j’ai lu de lui il y a quelques temps, malgré ses quelques défauts, me donnait envie de découvrir plus de la bibliographie de l’auteur. Par conséquent quoi de mieux que de se lancer dans son dernier roman publié en France qui, il faut bien l’avouer, propose un résumé assez intriguant et offre une couverture, illustrée par Aurélien Police, que je trouve vraiment très jolie.

Alors je préviens d’avance, maintenant que je me lance pleinement dans ma chronique, L’Adjacent fait partie de ses romans qu’il me sera difficile de chroniquer pour en faire ressortir pleinement mon ressenti. Il faut dire que l’auteur nous propose un récit qui va se révéler dense en réflexion, en questionnement philosophique et pratique, mais aussi en ramification concernant toute l’image de fond et ces théories sur le multivers, tout en proposant quelque chose d’onirique et de mystérieux. Il s’agit aussi d’un roman vraiment ouvert, que ce soit dans le déroulement de ses intrigues, comme dans ses idées et qui laisse par conséquent la part belle au lecteur où, je pense, chacun se fera se forgera sa propre opinion. En gros si je devais faire un résumé en quelques mots de ma lecture j’ai trouvé ce roman passionnant et pourtant une fois la dernière page tournée je reste légèrement frustré.

On plonge ainsi dès les premières pages dans le quotidien de Tibor qui vient de perdre sa femme suite à un attenta étrange et qui revient dans une Angleterre futuriste complètement différente que celle que l’on connait, où les perturbations climatiques ont changé le paysage et où l’Islam a l’air d’avoir gagner en influence transformant la Grande-Bretagne en Royaume islamique de Grande-Bretagne. Sauf que voilà, l’histoire de Tibor n’est pas la seule que l’on va suivre, plusieurs récits vont ainsi se dévoiler, s’entrecroiser parfois de façon abrupte, au fil des parties. J’avoue m’être senti légèrement dérouté à travers les différentes histoires que l’on croise et qui ne paraissent pas obligatoirement être liées les unes entre les autres et je dois bien le dire que j’ai apprécié être ainsi déconcerté, car il permet ainsi à l’auteur de nous offrir de nombreux axes de réflexions tout en nous proposant un voyage superbe.

En effet, pour peu qu’on accroche à cette narration et à la liberté laissé au lecteur, je me suis retrouvé intriguer et emporter par le récit qui va se révéler, si on gratte un peu, plus complexe qu’on peut le penser. Outre le fait que Christopher Priest est un excellent conteur, ce qui fait que chaque récit se révèle fluide et entrainant possédant sa propre vie, l’ensemble offre aussi quelque chose d’universel. Car même si on ne s’en rend vraiment compte qu’à la fin un des fils rouges est finalement une histoire d’amour qui va se révéler d’une grande force, même si parfois, j’avoue, maladroite sur certains aspects. Surtout l’auteur s’amuse clairement avec le lecteur, jouant sur la réalité, sur la possibilité d’exister dans plusieurs espace-temps quantiques à la fois. En fait pour faire simple et reprendre l’idée du livre, Priest joue au magicien, à l’illusionniste, avec le lecteur, le déroutant par l’adjacence, pour finalement mieux le surprendre par la suite tout en le faisait réfléchir sur de nombreux points comme l’identité, la vie, la perception de la réalité ou encore l’avenir et les mondes parallèles. Après je peux comprendre clairement que ce roman puisse dérouter le lecteur, car il s’agit aussi d’un roman perturbant par son aspect  totalement ouvert tout du long ; où chaque lecteur devra y puiser et y « écrire » ses propres réponses.

Les différents univers que l’on croise, que ce soit ce futur imaginaire, la première et la seconde guerre mondial ou encore Parchoux, qui à ce que j’ai compris est présent aussi dans d’autre romans de l’auteur, se révèlent vraiment intéressants à découvrir et surtout solides et bien documentés. On sent bien que l’auteur a pris le temps à chaque fois de travailler son sujet, pour nous offrir une image de fond à chaque fois unique et soignée. Ils partage aussi avec nous sa passion pour la magie, mais aussi par l’aviation et, je dois bien avouer, qu’il arrive à la communiquer de façon efficace, curieuse et vivante, sans jamais tomber dans l’ennui ou la lourdeur. D’ailleurs ces deux passions vont avoir un rôle à jouer dans le récit, mais aussi la notion de temps et d’espace qui sont développés de façon simples, sans trop tomber dans le scientifique, et qui pourtant se révèlent captivante avec cette Adjacent qui en est le point central. Mais une des grandes forces du récit vient de ses personnages qui paraissent tous différents, mais le sont-ils vraiment? Ne sont-ils pas à chaque fois les mêmes personnages qui se perdent et se retrouvent au fil des lieux, des univers et des époques? Le héros est-il le même à chaque fois, qui vit différentes vies? possède-t-il différents avatars dans des mondes parallèles? ou est-il devenu schizophrène et s’imagine des choses? Ou bien s’agit-il simplement de différent personnages à chaque fois qui possèderait la même essence? C’est ce questionnement tout du long qui, finalement, fascine, mais peut aussi repousser le lecteur qui aime les histoires construites de façons à fournir toutes les réponses. L’aspect « romantique » est traitée de façon fine et intéressante, avec cet amour complexe et fort qui se déchire pour mieux se reconstituer.

La plume de l’auteur joue aussi son rôle dans le fait qu’on tourne facilement les pages du livre. En effet ele se révèle poétique, fluide, et entrainante ce qui fait que, malgré un rythme finalement assez lent, on se retrouve véritablement happé par ce récit, emporté par les nombreuses idées que propose l’auteur au lecteur, le poussant ainsi régulièrement à devenir acteur de l’histoire, proposant et disposant de ses propres réponses. Comme je l’ai dit il est un peu difficile pour moi de véritablement retranscrire mon sentiment avec cette lecture tant l’oeuvre se révèle complexe, denses et surtout dépendra aussi fortement du lecteur et de sa façon de s’investir dans ce roman, ou chacun construire le puzzle mis en place par l’auteur à sa façon. Et finalement c’est peut-être là que vient aussi mon léger sentiment de frustration, avoir l’impression de louper une clé du récit, un élément révélateur, mais rien de vraiment dérangeant car au final l’auteur a réussi le pari de me donner envie de relire un jour le roman pour justement essayer de voir si je n’ai pas loupé un point, où si ma vision à ce moment là n’aura pas changé. Il va falloir maintenant que je sorte d’autres romans de l’auteur de ma PAL.

En Résumé : J’ai passé un très bon moment de lecture avec ce nouveau roman de Christopher Priest dont il m’est difficile d’en écrire mon ressenti tant l’ensemble se révèle finalement dense et possédant une certaine complexité. En effet l’auteur nous propose ici un récit qui joue avec le lecteur, un peu comme un illusionniste, avec le temps, l’espace et la réalité, proposant ainsi différentes histoires qui paraissent liées entre elles et dont on dévoile un peu plus au fil de la lecture les mystères. Le grand intérêt du roman vient que chaque lecteur, finalement, se fera son propre avis, son propre « puzzle » des pièces laissées par l’auteur, ce qui pourrait déranger ceux qui aiment un récit ou tout est expliqué, mais qui pour m’a part m’a fasciné et offert une lecture différente. Surtout l’auteur nous offre un récit universel, une histoire d’amour, certes qui parait se jouer des frontières physiques, mais qui pourtant se révèle touchante dans son évolution. L’univers construit par l’auteur est solide, efficace où l’auteur nous partage ses passions pour la magie et l’aviation le tout de façon soignée et sans tomber dans les longueurs ou les lourdeurs. Alors après c’est un roman ouvert, où comme je l’ai dit chacun y trouvera ses propres réponses, mais je ne peux m’empêcher de me sentir tout de même légèrement frustré, comme si j’avais l’impression d’avoir manqué une clé ou un élément important. Rien de non plus bloquant, car cela me donne envie de relire ce livre un jour ou l’autre. Il faut dire aussi que la plume de l’auteur fluide, poétique et entrainante y joue aussi pour beaucoup, happant le lecteur assez facilement.

 

Ma Note : 8/10

 

Autres avis : Vepug, Mariejuliet, joyeux-drille, julien le naufragé, Felina, Koré, …

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  1. J’aime beaucoup l’illustration d’Aurélien Police, je trouve qu’elle fonctionne bien. J’ai bien aimé ce tour d’illusionniste… Et plus précisément, le moment où tu comprends le rapport entre les fils (qui diffère selon les lecteurs). Je sais que les romans ouverts peuvent ne pas convenir à certains mais j’ai apprécié d’un bout à l’autre car le récit est particulièrement bien construit.

  2. En général, les fins ouvertes me plaisent bien, donc ça devrait aller.
    Et je constate que tu as apprécié ce roman sans avoir lu beaucoup d’autres romans de Priest, alors que « L’adjacent » semble un peu faire la synthèse de l’oeuvre de l’auteur. Tant mieux, ça veut dire que je peux le lire sans forcément lire les 2 ou 3 autres romans de l’écrivain que j’avais prévus… 😀

    • ALors après je ne fais que des suppositions, mais je me dis qu’on doit louper quelques références avec Parchoux, par contre ça ne m’a pas dérangé du tout dans ma lecture.

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