Latium, Tome 1 – Romain Lucazeau

latium-tome-1Résumé : Dans un futur lointain, l’espèce humaine a succombé à l’Hécatombe. Reste, après l’extinction, un peuple d’automates intelligents, métamorphosés en immenses nefs stellaires. Orphelins de leurs créateurs et dieux, esseulés et névrosés, ces princes et princesses de l’espace attendent, repliés dans l’Urbs, une inéluctable invasion extraterrestre, à laquelle leur programmation les empêche de s’opposer.
Plautine est l’une d’eux. Dernière à adhérer à l’espoir mystique du retour de l’Homme, elle dérive depuis des siècles aux confins du Latium, lorsqu’un mystérieux signal l’amène à reprendre sa quête. Elle ignore alors à quel point son destin est lié à la guerre que s’apprête à mener son ancien allié, le proconsul Othon.

Edition : Denoël Lunes D’Encre

 

Mon Avis : Ce roman, j’avoue, il était sûr de terminer dans ma PAL. En effet, depuis la première fois que j’en ai entendu parler, ce qui remonte a maintenant un an déjà sur le blog de l’éditeur, la présentation m’a tout de suite donné envie de découvrir ce roman, le présentant comme un très ambitieux space-opéra écrit par un auteur français et, qui plus est, s’avère être un premier roman. Certes, il y a toujours une petite appréhension de ne pas être conquis, mais voilà l’envie de le découvrir, ajouté à un résumé accrocheur et une illustration de couverture, réalisée par Manchu, que je trouve magnifique, ont fait que je me suis très rapidement plongé dans ce récit.

Ce roman nous plonge ainsi dans un avenir lointain, où l’Humanité s’est éteinte. Les Intelligences Artificielles, serviteurs des hommes, ont assisté à cette fin, les obligeant à devoir apprendre à vivre sans leurs créateurs, migrant à travers des nefs immenses et se lançant dans l’espace où va alors démarrer une longue guerre avec les barbares. Plautine, en stase depuis plusieurs siècles va être réveillé par la captation d’un étrange signal, qui vient relance l’infime possibilité que l’Homme pourrait toujours être présent. Elle se lance alors à la recherche de soutien. Alors  ce premier tome de Latium, valait-il le coup ? Pour résumer, une fois les dernières pages tournées, je dois bien avouer que oui, il s’agit d’un très bon roman, fascinant et complexe.

L’auteur a ainsi décidé de construire son récit clairement comme une tragédie grecque, tout en y mélangeant du space-opera, du roman post-apocalyptique et le tout mâtiné d’une bonne dose de philosophie, de questionnements et de réflexions soignés. L’ensemble s’avère ainsi dense, très dense, que ce soit dans l’intrigue, les messages que le récit cherche à faire passer, mais aussi dans les descriptions. Le moindre détail peut ainsi paraitre prendre de l’ampleur et des lignes, sur un rythme posé voir lent, ce qui pourra en bloquer certains qui n’apprécient pas les descriptions trop longues. Pourtant de mon point de vue j’ai trouvé cela fluide, entraînant et, d’une certaine façon, flamboyant dans les images offertes. On sent ainsi tout du long qu’il y a un vrai travail de l’auteur dans la richesse qu’il propose au fil des pages, ne laissant rien au hasard et qui, je trouve, épate pour un premier roman, même si, c’est vrai, par moment il cherche peut-être à trop en faire. Rien de non plus trop dérangeant, tant je me suis retrouvé à tourner facilement les pages pour découvrir cet avenir surprenant, captivant ainsi que l’intrigue qu’il dévoile petit à petit.

Je n’aime pas trop faire de comparaison mais l’univers que développe l’auteur n’est pas sans rappeler celui de Banks concernant son cycle de la Culture ou encore Simmons mais pas que ceux là non plus. Sauf que voilà l’auteur a réussi, je trouve, à créer son propre univers, à y apporter sa propre patte tout en le rendant logique, vivant et cohérent. L’aspect technologique, que ce soit sur les IA, les vaisseaux et autres, sans non plus révolutionner le genre, s’avère franchement riche, visuellement attrayant et fascinant. Surtout l’auteur ne évite de se lancer dans le hard-science et arrive pour autant à offrir quelque chose de logique, de compréhensible et réaliste. Cela offre d’ailleurs aussi une scène de bataille spatiale que j’ai trouvé épique, explosive et entraînante, même si peut-être par moment un chouïa longue à mon goût.

J’ai beaucoup aimé aussi ce que fait l’auteur avec l’idée des IA, les différents niveaux, la séparation de leurs consciences, tout en les humanisant d’une certaine façon. J’ai trouvé ça plutôt efficace et intéressant, apportant aussi une réflexion efficace. L’aspect politique n’est pas non plus en reste, enfin si on peut parler de politique quand on parle d’IA, s’avérant solide pour le peu que l’on découvre dans ce premier tome. Que ce soit dans la notion d’Empire, dans la guerre avec les Barbares ou encore dans le jeu politique, il y a quelque-chose qui se dégage, je trouve, et qui devrait prendre logiquement plus d’ampleur dans le second tome pour notre plus grand plaisir. Le mélange des genres proposé par l’auteur fonctionne plutôt bien. Seul un point m’a dérangé. Ce futur est présenté comme une sorte d’Uchronie qui voudrait que l’Empire Romain ait survécue, le soucis c’est que l’ensemble n’est jamais clairement expliqué, ce qui n’est pas le but du récit non plus, mais surtout parait par certains aspects, justement, trop figé. Est-ce gênant ? Pas vraiment, il suffit juste d’accepter ce fait, cela n’influençant pas trop, je trouve, la lecture.

Après, comme je l’ai dit, l’autre point intéressant du roman, vient des nombreuses réflexions que propose l’auteur au fil des pages. On y retrouve ainsi un vrai travail complexe posant de nombreuses questions sur le lien entre l’homme et la machine, plus précisément ici avec l’IA et ses règles. Certes on n’invente pas la poudre, ne me tombez pas dessus, mais l’aspect intéressant vient ici que le problème est un peu retournée. En effet il nous fait découvrir un monde où l’homme a disparu et où les machines se retrouvent à devoir survivre, figé dans une position dérangeante par ces règles immuables, et qui d’une certaine façon se retrouvent sans véritable avenir. Ce n’est pas non plus la seule question que soulève l’auteur dans ce récit, il nous fait aussi réfléchir sur la notion de divinité, sur la connaissance qui d’une certaine façon amène à remettre en cause le divin justement, sur l’identité et ce qui la compose, sur la conscience, les conflits ou bien encore sur l’idée de liberté. L’ensemble est ainsi recroisé avec des philosophes grecques, mais ne fuyez pas, il n’est pas nécessaire des les connaitre sur le bout des doigts pour se laisser emporter par ce récit. Concernant les personnages, l’auteur nous propose des héros intéressants que ce soit à travers les IA, leurs « névroses » et leurs façon de se gérer, mais aussi concernant les autres personnages secondaires proposés, les interactions qu’ils proposent ainsi que leurs évolutions. Alors parfois certains développements, que ce soit dans les relations comme dans l’apprentissage, sont peut-être un peu rapides, principalement dans le dernier tiers, ce qui peur paraitre un chouïa précipité, même si rien de trop bloquant non plus.

Alors après quelques points m’ont tout de même dérangé, comme par exemple l’utilisation de Deus Ex Machina, pas tant celui qui est clairement annoncé qui est logique, mais plus sur l’évolution proposée de Plautine qui lui permet un peu trop de facilités dans le dernier tiers du récit. J’ai aussi trouvé ce dernier tiers légèrement précipité, comme si l’auteur était pressé d’entrer dans la seconde phase de son intrigue. Enfin, dernier point que je soulèverai ce sont les notes de bas de pages, je ne suis pas un grand adepte de ce procédé déjà à la base et même si ici, parfois, elles ont été utiles il y en avait trop. Alors, j’ai bien constaté que cela soutenait un certain travail littéraire, mais voilà je n’ai que moyennement accroché. Au bout d’un moment je ne les lisais plus. Cela ne gâche pas non plus la qualité du récit, mais se ressent par rapport au reste de l’histoire. Au final rien de non plus dérangeant, tant j’ai passé un très bon moment de lecture avec ce premier tome, efficace, riche et bien porté par une plume dense, soignée et entraînante. Je lirai sans soucis la suite qui, d’ailleurs, depuis les Utopiales est déjà dans ma PAL.

En Résumé : J’ai passé un très bon moment de lecture avec le premier tome de ce roman qui nous propose de découvrir une histoire riche, soignée et dense que ce soit dans son intrigue comme dans son travail sur l’image de fond. Certes l’ensemble offre un rythme posé et très détaillé qui pourrait en bloquer certains, mais que j’ai trouvé fluide, entraînant et plus qu’efficace. J’ai ainsi tourné les pages facilement pour en apprendre plus et savoir où aller nous mener l’auteur que ce soit dans son intrigue comme dans ses réflexions. L’univers proposé, certes se retrouve dans d’autres grands romans, mais l’auteur arrive à y apposer sa patte pour rendre l’ensemble intéressant et vivant, offrant ainsi des idées denses et complexes que ce soit sur la technologie comme dans l’intrigue. Je reprocherai juste une envie de faire une uchronie qui m’a un peu laissé perplexe dans certains aspects un peu trop figés. Les réflexions et questionnements qui sont soulevés tout du long que ce soit concernant notre rapport à la machine, sur le divin, la connaissance, la conscience ou bien encore sur les conflits s’avèrent captivantes, bien amenés et ne laissent pas indifférents le lecteur. Les personnages, ainsi que la personnification des IA, se révèlent intéressants même si par moments certaines évolutions m’ont paru un peu rapide. Je regretterai par contre une facilité concernant Plautine qui offre trop de libertés, l’impression d’un dernier tiers légèrement rapide ainsi que des notes de bas de pages que je n’ai pas toujours trouvé utiles. Rie de non plus trop bloquant tant j’ai été emporté par ce roman, foisonnant, riche et dense bien porté par une plume soignée et captivante. Je lirai la suite sans soucis.

 

Ma Note : 8/10

 

Autres avis : Phil, Koré, Herbefol, Apophis, Lutin82, …

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  1. Bon et bien c’est tentant, j’avais repéré la couverture l’autre foi, je pense me le procurer dès demain si je le trouve près de chez moi.

    Décidément va falloir que je lise moins tes articles, ce sera mon deuxième achat en un mois grâce à tes chroniques. Un pont sur la brume était génial au fait !

    • Merci pour ton commentaire, ,ça fait toujours plaisir ! En tout cas j’espère que Latium te plaira tout autant, bonne lecture.

  2. Je souscrit à 99% à ton avis!
    Roman qui tient globalement ses promesses et ce n’était pas évident en raison de l’attente. Je ne pense pas comme toi qu’il fera le bonheur de tous les amateurs de SF.

    Merci pour le lien.

    • De rien pour le lien j’essaie de le faire quand j’y pense. Concernant Latium c’est vrai qu’il y avait une certaine attente, et le tome 2 l’attente et encore un peu plus haute.

  3. Fnitter

    Y’a pu ka le lire alor… 🙂
    Mais je l’ai déjà dis plusieurs fois…

  4. Ça a l’air vraiment tentant, je l’avais déjà repéré mais tu m’as définitivement convaincu ! (au passage bravo pour le blog que je découvre et que je trouve très sympa)

  5. Je l’avais déjà repéré sur les étals de notre librairie, et j’avoue qu’il me faisait bien envie… Et tu m’as convaincue de tenter le coup ! Il va falloir que je me le procurer au plus vite !

  6. Comme tu vois, j’ai trouvé le courage d’allumer le pc ^^ Ma curiosité l’a emportée.
    J’ai lu l’avis d’Herbefol (négatif) et le tien (positif).
    Vos avis convergent en un seul point, l’inutilité des bas de page. J’en ferai l’impasse!

    Je vais le tenter parce que je suis curieuse de savoir vers quelles réflexions il va m’emmener.
    Merci!

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