L’Insondable Profondeur de la Solitude – Hao Jingfang

Résumé : Le futur tel que vous ne l’avez jamais lu. À travers douze nouvelles d’une rare sensibilité, Hao Jingfang explore l’humain face à un avenir incertain. L’insondable profondeur de la solitude, c’est celle de l’individu confronté à la marche inéluctable du temps et de la civilisation, de l’évolution et de la technique, de l’aliénation et du pouvoir. Sa fragilité et sa détresse, ses désirs et son besoin de résistance, ce sont les nôtres, nous les partageons universellement, et Hao Jingfang les éclaire d’une plume délicate et compatissante.

Edition : Outre Fleuve

 

Mon Avis : Hao Jingfang est une autrice que j’ai découvert il y a peu. C’était lors de sa venue aux dernières Utopiales et, principalement, à travers sa nouvelle Pékin Origami qui était publiée dans l’anthologie du festival. Ce texte m’avait d’ailleurs offert un très bon moment de lecture, offrant une histoire intelligente, soignée avec une construction et un personnage intéressant, même si peut-être un peu distante (ma chronique ici). Ce nouveau livre est en fait un recueil qui nous propose ainsi de découvrir plusieurs nouvelles de l’autrice dont le fameux Pékin Origami qui n’était, finalement, présenté qu’en avant-première dans l’anthologie des Utopiales. Alors, contrairement à ce que je fais d’habitude je ne vais pas chroniquer chacune des onze nouvelles, mais faire une chronique plus globale. Certes ça va être moins exhaustif, mais mon ressenti est globalement le même. Concernant le livre en lui-même je suis un peu déçu du travail de l’éditeur non pas sur la couverture, car pour ma part je trouve sympathique même si rien de transcendant, mais plus sur le livre. Entre un typo large qui permet de « gonfler » les pages, une traduction qui me parait parfois étrange et une absence de sommaire, je trouve que ce livre aurait mérité un travail un peu plus soigné.

Alors, une fois la dernière page tournée de ce recueil, je dois bien admettre que mis à part justement Pékin Origami qui m’avait convaincu, le reste a eu du mal à complètement m’emballer. Je ne vais pas dire que ce recueil est entièrement raté, je ne le pense pas, proposant des aspects intéressants, mais il n’a jamais réussi à franchement me convaincre. Le problème avec Hao Jingfang c’est qu’elle ne manque pas d’idées et de réflexions souvent intéressantes, maintenant là où, selon moi, elle rate le coche c’est dans l’aspect construction de ses idées pour en faire un texte. Le quatrième de couverture annonce que la Science-Fiction a été bannie pendant 30 ans en Chine et qu’elle revient actuellement au premier plan, et c’est un peu ce que j’ai ressenti en lisant ce recueil, d’avoir des textes qui ont parfois 30 ans d’âge. Que ce soit dans le style, comme dans cette façon de développer les idées j’ai eu cette impression d’être dans un récit qu’on classe dans l’âge d’or de la SF, mais cette vieille SF qu’on a un peu oublié justement par manque de soin et de richesse. Je peux comprendre parfaitement que cela fonctionne pour des lecteurs qui ne cherchent pas obligatoirement une SF pointue, même si le style m’a aussi un peu dérangé mais j’y reviendrai, ou pour des lecteurs n’ayant quasiment aucune entrée dans ce genre de lecture et pour qui les termes trop « techniques » dérangent. D’un autre côté j’aurai du mal à conseiller ce recueil à des lecteurs habitués à l’imaginaire.

Pourtant, comme je l’ai dit, on ne peut pas dire que l’autrice manque d’idées. On y retrouve ainsi au fil des textes de nombreuses réflexions intéressantes et qui, surtout, font aussi écho au fait que Hao Jingfang soit chinoise, même si elles restent assez universelles. Ainsi que ce soit son idée sur l’invasion extra-terrestre qui permet ainsi de traiter de l’envahissement, de l’assimilation, de la colonisation, de la révolution ou bien encore cet aspect sur les clones qui permet de faire réfléchir sur la notion d’existence, d’unicité, sur ce qui fait de nous ce que nous sommes. L’autrice traite aussi des thèmes de la mort, du recommencement, de la culture et ses changements, du cycle de la vie, mais aussi d’aspects comme la solitude, l’individualité ou bien encore la société avec son côté figé et la façon dont elle nous « forme ». Il y a aussi cette idée, souvent mise en avant, du changement, de société qui sont obligés d’évoluer, d’avancer face à des bouleversements plus grands et qui n’est pas sans faire écho au fait que la Chine a dû énormément évoluer très rapidement. On y retrouve aussi des aspects qui paraissent chères à l’autrice, que ce soit la musique classique, l’Histoire et les légendes, les traditions et leurs importances, leurs influences. C’est dommage car les idées qui sont brassées ici, l’embryon de traitement qu’offre l’autrice paraissent intéressants et auraient pu se révéler beaucoup plus prenantes et intéressantes. Cela m’a un peu donné l’impression de textes bruts qui auraient encore mérité d’être polis.

Je vais tenter d’expliquer ce qui m’a dérangé dans la façon dont l’autrice construit ses nouvelles. Dans un premier temps il m’a paru que dès qu’elle a une idée en tête elle fait tout pour aboutir à ce qu’elle s’imagine, parfois au-delà de la logique ou de la cohérence. Par moments cela donne une impression de récit bancal, qui ne tient pas la route, qui parait un peu incohérent, « enfantine » (sans chercher à être péjoratif) où ce n’est pas l’histoire qui doit s’adapter à l’ensemble, mais bien l’ensemble qui doit s’adapter au récit avec tout ce que cela peut occasionner de problématique. Cela me fait penser aux nombreuses interview d’auteurs ou autrices qui disent qu’ils ont souvent une idée, des personnages, mais plus ils avancent dans l’écriture plus l’ensemble prend son indépendance, là je n’ai pas l’impression que ce soit complètement le cas. Hao Jingfang donne l’impression de « forcer » son récit à rester ancré dans la vision qu’elle a en tête et rien d’autre. Ensuite, un autre point qui m’a souvent dérangé c’est régulièrement un manque de profondeur, d’explication dans les nouvelles. Je suis régulièrement sorti frustré par cette impression de manquer d’informations pour franchement comprendre l’univers et, par la même occasion, de bien imaginer où veut mener l’autrice. Après, et j’en ai déjà parlé, il y a aussi cette impression de lire plus des textes de l’âge d’or de la SF qu’une SF récente que ce soit dans le traitement comme dans l’impression que laisse les textes, mais sans en atteindre le côté accrocheur, percutant des bons textes de l’époque.

Il faut aussi rajouter une plume qui m’a paru manquer de richesse, s’avérante plate et un peu fade, mais pour ce point là je le nuancerai un peu, car il m’a aussi paru y avoir des soucis de traduction. Difficile de pouvoir pleinement juger, mais certaines phrases m’ont paru bancales ou contenir de nombreuses répétitions. Maintenant tout n’est pas non plus mauvais, oui l’autrice a des idées et parfois cela fonctionne, outre Pékin Origami qui se dégage clairement, j’ai aussi trouvé plutôt sympathique des textes comme Le Palais Epang, L’Envol de Cérès ou encore, dans une moindre mesure, Question de Vie ou de Mort pour son ambiance. Maintenant voilà c’est trop peu pour me permettre d’accrocher pleinement à ce recueil. Peut-être que c’était un rendez-vous manqué, ou alors j’avais peut-être trop d’attentes avec ce recueil, ou bien encore la SF chinoise a un retard qui se fait énormément ressentir dans la construction de récit de l’autrice, je ne sais pas trop. En tout cas je laisse à chacun se faire son propre avis.

En Résumé : Je ressors de ma lecture de ce recueil de nouvelles un peu déçu, n’ayant pas réussi à franchement me captiver pour les différents textes mis à part Pékin Origami que j’avais déjà lu. Certes Hao Jingfang ne manque pas d’idée, de réflexions, elle brasse ainsi beaucoup de questions que ce soit par exemple sur la notion d’envahissement, de colonisation, de bouleversement de changement. Elle parle aussi de la culture, des traditions, du cycle de la vie et principalement de la solitude voir de la mort. De nombreux aspects sont ainsi soulevés et qui, globalement, n’auraient pas dû me laisser en partie indifférent, sauf que j’ai trouvé que l’autrice avait du mal à transformer ses idées en véritables textes captivants. J’ai ainsi trouvé que la construction donnait l’impression soit de trop forcer les éléments autour de l’idée développée au point d’en devenir incohérent, soit par moment de se révéler un peu « enfantine ».  Ensuite j’ai aussi trouvé, dans certains textes que le récit manquait de profondeur, de développement et frustrait plus que n’accrochait. J’ai aussi eue cette impression de lire de la SF de l’âge d’or, mais celle démodé, qu’on a un peu oublié tant elle devenait improbable. Après tout n’est pas mauvais, deux ou trois textes en dehors de Pékin Orgami m’ont tout de même paru sympathiques. Après peut-être que ce recueil pourra plaire a des lecteurs qui lisent peu de SF, pour des lecteurs habitués à l’imaginaire j’aurai du mal à le conseiller. Concernant la plume de l’autrice je l’ai trouvé plate, un peu fade, mais difficile de pouvoir juger, car la traduction m’a paru par moment se révéler bancale. Au final un peu déçu de ma lecture, peut-être que le fait que la Chine ait banni la SF depuis 30 ans se fait ressentir, ou peut-être que j’en attendais trop.

 

Ma Note : 4/10

 

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  1. Y’a un petit côté old school de ce que j’en ai lu (j’en suis à la moitié) mais je passe pas un mauvais moment pour ma part ^^

  2. Il me fait pas envie celui-là, et d’après les avis que j’ai lu pour l’instant, c’est pas un mal !

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