Planetfall – Emma Newman

Résumé : Touchée par la grâce, Lee Suh-Mi a reçu la vision d’une planète lointaine, un éden où serait révélé aux hommes le secret de leur place dans l’Univers. Sa conviction est telle qu’elle a entraîné plusieurs centaines de fidèles dans ce voyage sans retour à la rencontre de leur créateur. Vingt-deux ans se sont écoulés depuis qu’ils sont arrivés là-bas et qu’ils ont établi leur colonie au pied d’une énigmatique structure extraterrestre, la Cité de Dieu, dans laquelle Lee Suh-Mi a disparu depuis lors.
Ingénieur impliquée dans le projet depuis son origine, Renata Ghali est la dépositaire d’un terrible secret sur lequel repose le fragile équilibre de la colonie, qui pourrait voler en éclats avec l’entrée en scène d’un nouveau membre, un homme qui ressemble étrangement à Suh-Mi, trop jeune pour faire partie de la première génération de colons…

Edition : J’ai Lu Nouveaux Millénaires

 

Mon Avis : Emma Newman est une auteur anglaise qui est surtout connu pour ses romans d’Urban Fantasy à l’époque victorienne, dont j’ai vu passer des échos sur les blogs VO que je suis régulièrement. D’ailleurs je suis bien tenté par son dernier roman qui vient d’être publié en Anglais de Gaslamp Fantasy, mais là n’est pas le sujet. Planetfall est, si je ne me trompe pas, son premier roman SF, mais aussi surtout son premier roman publié en France et j’avoue avoir rapidement craqué au vu des chroniques que j’ai vu passer à droite et à gauche. Concernant la couverture, elle reprend celle en VO que je trouve plutôt sympathique.

Ce roman nous plonge dans un futur où, entrainé par Lee Suh-Mi une jeune femme qui a reçu une vision, des centaines de personnes sont allé coloniser une planète où ils ont trouvé la Cité de Dieu. Bien des années plus tard, ils vivent paisiblement dans un village dans l’attente du retour de la Cité de Dieu de Lee Suh-Mi qui viendra leur montrer la voie. Sauf qu’un nouvel arrivant va venir bouleverser l’équilibre nait dans cette colonie. Une fois la dernière page de Planetfall tournée je dois bien admettre que j’ai passé un très bon moment de lecture avec ce roman, qui pourra même ravir différents types de lecteurs. Ce que j’entends par là c’est qu’on plonge ici dans une histoire à la fois efficace et pleine de rebondissements et de surprises, mais aussi dans un récit intelligent qui nous offre de nombreux axes de réflexions. Il faut dire qu’on est rapidement happé par ce roman, déjà grâce une narration à la première personne maîtrisée qui devient rapidement immersive, mais aussi par la tension qui se dégage tout le long du récit et qui gagne lentement en intensité. On se retrouve ainsi à tourner rapidement et facilement les pages avec l’envie d’en apprendre plus sur les nombreux secrets qui se cachent au niveau de cette colonie et que vient voler en éclat ce nouvel arrivant qui ne parait pas si étranger que cela.

L’univers futuriste que l’on découvre au fil des pages ne manque pas  d’attrait, que ce soit d’un point de vue technologique comme d’un point de vue social. On découvre ainsi un futur ou tout le monde est connecté pour permettre de faciliter les échanges et d’être tous liés dans un monde possiblement hostile, ce qui a certes ses avantages, mais aussi ses inconvénients. On a l’impression que tous sont connectés à un immense réseau social et qu’au final chacun connaît tout sur tout le monde, même si une certaine vie privée reste en partie préservée. Cela influence aussi la façon de communiquer et on se rend rapidement compte que le réseau est limite devenu l’élément central d’échange, comme si toute information devait être su de tous, ce qui finalement nous fait réfléchir sur nous-même et la façon de transmettre des informations. Dans ce futur l’imprimante 3D est devenue un élément essentiel de la colonie, elle permet de construire l’ensemble des désirs de chacun, il faut simplement maîtriser les ressources globales, et permet ainsi de nombreuses choses fascinantes. L’aspect technologique se fond surtout parfaitement dans le décor que construit l’auteur, s’avérant cohérent et efficace et donnant envie d’en apprendre plus.

L’aspect social est aussi l’un des gros points à découvrir. En effet dans un tel monde on pourrait penser qu’il se révèle apaisé, ouvert, où tous vont dans le même sens, et même si par certains aspects il est libéré, par d’autres on se rend rapidement compte que c’est loin d’être le cas. Malgré toutes les technologies on y découvre une colonie qui cache de nombreux secrets, de nombreux non-dits, de nombreux mensonges, mais aussi des manipulations et des jeux de pouvoirs. L’Homme a beau avancer, évoluer, améliorer sa vie, avoir un but commun il reste ainsi toujours égal à lui-même et c’est ce qu’on découvre à travers le regard de Renata qui n’est pas non plus exempte de tous défauts loin de là. Une colonie gangrenée qui partait à la recherche d’un monde meilleur, mais qui finalement va devoir faire face à elle-même et ses contradictions. Mais surtout ce qui porte efficacement le récit c’est Renata elle-même. L’auteur nous dresse un portrait fascinant et intimiste d’une héroïne loin d’être fiable et qui cache une affection que l’on va peut à peut découvrir. On n’est pas dans l’héroïne classique, mais plus dans une personne abimée en profondeurs, pleine de souffrances, de trahisons, de rêve brisés, d’espoirs déçus, dont les nombreux secrets et mensonges la ronge en plus de sa déficience et qui au fil des pages marque le lecteur. On s’attache ainsi rapidement et facilement à elle et le regard des autres nous touche tant l’auteur maîtrise son sujet, ce qui nous pousse à réfléchir.

L’autre point captivant de ce récit vient des réflexions que nous propose l’auteur que ce soit sur la vie en communauté, la notion de vie privée, la maladie, l’équilibre, ou bien encore des sujets la foi et ce qui la motive, le parallèle entre la science et la foi ou bien encore la notion de vie extra-terrestre, ce récit brasse de nombreux sujets et en grande majorité de façon plus qu’efficace. L’existence de dieu devient ainsi un point central du récit et, sans trop en dire, l’auteur arrive à construire quelque chose d’efficace, d’ambigu, sans tomber dans le poncif ou dans une argumentation trop lourde. Elle nous fait ainsi réfléchir sur cette notion, tout ce qu’on peut y mettre derrière et surtout la façon dont certains peuvent s’en servir que ce soit en bien ou en mal.  La maladie est aussi traitée de façon intelligente et sobre, sur le regard qu’on peut porter et la norme qu’on met derrière ce mot.

Alors, tout n’est pas non plus parfait, déjà le fait de ne se concentrer que sur Renata a pour effet d’éclipser énormément les autres personnages, ce que j’ai trouvé légèrement dommage, surtout concernant Marks ou Sung-Soo qui aurait peut-être mérité un travail un peu plus en profondeur. Ensuite j’ai trouvé que certains évènements, vers la fin, étaient traités un peu trop rapidement, cela permet certes d’offrir une accélération dans le dernier quart du récit, mais qui s’avère aussi légèrement frustrant. Enfin concernant la conclusion, elle n’est pas mauvaise en soit, restant très ouverte, mais voilà je ne sais pas pourquoi elle m’a paru « facile ». L’auteur donnant pour moi l’impression de vouloir contenter tout le monde en évitant d’offrir des réponses trop tranchées, mais joue trop à l’équilibriste. Après ce ne sont que quelques détails, j’ai passé un très bon moment avec ce bouquin, bien porté par une plume efficace, vivante et entraînante et je lirai sans soucis d’autres écrits de l’auteur.

En Résumé : J’ai passé un très bon moment de lecture avec Planetfall qui nous offre à la fois une histoire efficace, entrainante et pleine de rebondissements, mais aussi un récit intelligent. On plonge rapidement dans ce récit qui offre dès le départ une tension qui gagne en intensité au fil des pages et des révélations. L’univers construit est plus qu’efficace, que ce soit d’un point de vue technologique avec ces outils de communication ou ces imprimantes 3D, mais aussi d’un point de vue social. On découvre ainsi une colonie qui malgré son vernis de paix et d’entente cache finalement de nombreux secrets, des luttes de pouvoir et des mensonges. Mais surtout ce qui porte le récit c’est la voix de Renata, l’auteur construisant une héroïne que j’ai trouvé passionnante et touchante. On est loin du personnage parfait, se révélant d’une certaine façon abîmée, pleines de rêves déçus, d’espoirs brisés, de trahisons et de mensonges qui la ronge. Une héroïne malade, qui nous marque et nous pousse à réfléchir sur le regard qu’on peut avoir. C’est d’ailleurs l’autre point efficace du récit, les questions soulevées sur la vie en groupe, la notion de vie privée, la notion de foie ou encore sur la possibilité d’une vie extra-terrestre. Alors après quelques points m’ont quand même dérangé, comme le fait que la narration à la première personne, certes immersive, éclipse les autres personnages, certains évènement m’ont paru traité un peu trop rapidement et enfin la conclusion même si elle n’est pas mauvaise m’a un peu laissé sur ma faim. Mais rien de non plus bloquant tant j’ai passé un bon moment avec ce roman, bien porté par une plume vive, efficace et je lirai sans soucis d’autres écrits de l’auteur.

 

Ma Note : 8/10

 

Autres avis : Joyeux-Drille, Elessar, Yogo, …

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  1. Il faudrait que je le tente !

    • Franchement je ne peux que le conseiller, si tu t’attaches autant que moi à l’héroïne il devrait plaire. En tout cas j’espère qu’il te plaira autant qu’à moi si tu le lis.

  2. Intéressante critique, comme toujours, qui confirme, si besoin était, la bonne réputation de ce roman.

    Concernant la novella Brother’s Ruin, que tu mentionnais en introduction, je suis justement en train de la lire, critique à venir vendredi.

  3. Entièrement d’accord avec toi, ce roman n’est pas exempt de défauts surtout la fin un peu « rapide » mais cela reste un excellent roman !

  4. Oooh, je ne connaissais pas du tout, ta chronique m’intrigue ! Je le note avec grand plaisir, même s’il alourdit mon panier déjà bien conséquent de futurs achats 😀

  5. Une fin un peu expédiée oui, et très ouverte, ce qui en peut en gêner plus d’un, mais le reste du roman rattrape largement ces petits points négatifs.
    Bon, j’ai une critique à écrire moi ! 😀

  6. Une histoire qui permet de se rendre compte (si tant est qu’on en est besoin), que peu importe où les humains sont transposés, ils emportent avec eux leurs forces et faiblesses, leurs rêves qui continuent d’inclure, pour certains, un « dieu » quel qu’il soit. Et peu importe le niveau de technologies avancées, la donne reste la même. A peu de choses près 🙂

    J’ai passé un très bon moment avec cette histoire, tout comme toi. Peut-être qu’il est dommage, comme tu le soulignes, de ne pas avoir plus de personnages creusés, mais celui de Renata est bien construit. Elle a apparemment su nous toucher pour les mêmes raisons.

    Je ne sais pas quand je lirai la « suite » mais ça se fera, même si en VO

    • C’est un peu ça, ce qui s’annonçait comme une « élévation » d’un groupe de personnes, en devient simplement une lutte de bas-instincts chez des humains.

      De toute façon l’éditeur a prévu de ne pas publié les suites après After Atlas donc ce sera obligatoirement à un moment en VO.

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