Shikasta – Doris Lessing

Résumé : Ceci est l’histoire d’un monde qui pourrait être le nôtre. Depuis l’instant où apparaît la vie sur cette planète bleue, dans la moiteur des mares et des étangs, jusqu’au moment où le feu nucléaire menace d’emporter la civilisation qui a fini par se développer, voici contée l’histoire de Shikasta, jadis riche et florissante, désormais stérile, inhospitalière, « blessée à mort » – mais qui ne demande qu’à renaître.
Shikasta ? Un monde sur le berceau duquel se sont penchés deux empires galactiques antagonistes, Canopus et Sirius, qui s’en sont partagé les terres pour chacun de son côté y conduire des expériences évolutionnaires. Et c’est du point de vue des émissaires de Canopus, venus rendre compte des résultats de ces manipulations à l’échelle d’une planète, que va nous être narré le destin tragique de l’humanité – celle de notre Terre.

Edition : La Volte

 

Mon Avis : J’avoue, je me suis laissé tenter par ce roman il y a un an environ, c’était lors des Utopiales 2017. En effet le roman était mis en avant dans la librairie du festival et il avait attiré mon regard. Je me suis rapidement retrouvé intriguer par l’idée de voir ce que pouvait proposer une autrice, Prix Nobel nobel de littérature en 2007, en offrant ici un roman annoncé comme de Science-Fiction. Surtout que Wikipédia l’annonçait comme une « conteuse épique qui scrute une civilisation divisée » si avec cela il n’y a pas de quoi faire quelque-chose en SF. Par curiosité j’ai donc décidé de le faire entrer dans ma PAL et, il y a peu, de lui laisser enfin sa chance pour me faire mon avis. Concernant la couverture, elle est très sobre, loin de ce qui se fait généralement dans l’Imaginaire.

Ce roman est en fait, d’une certaine façon, l’ancien testament écrit et imaginé par Doris Lessing. On découvre ainsi qu’il existe plusieurs civilisations dans l’espace, certaines qui sont vouées au bien tandis que d’autres sont vouées au mal. Canopus et Sirius se sont ainsi lancés dans le projet scientifique de suivre, aider et influer sur l’évolution d’une planète aux ressources exceptionnelles : Shikasta. Bien entendu Shikasta est la représentation fictive notre planète Terre et rapidement on va se rendre compte que tout ne va pas se passer comme prévu, qu’une influence néfaste va obliger à modifier les plans mis en place. En effet un désalignement des planètes a permis à Shammat, le Mal, d’accroitre son ascendance sur la Planète Shikasta. Ainsi, l’Humanité se retrouve chassé de l’Eden mis en place et va devoir apprendre à se débrouiller. Franchement il y avait un certain potentiel dans l’idée de départ, de vouloir construire quelque-chose de vaste, mélangeant les différents genres de l’Imaginaire pour y apporter une réflexion sur notre monde, notre évolution, notre société. Certes le genre qui sert comme base les textes religieux pour y amener un background plus SF a déjà été vu plusieurs fois, mais il y avait du potentiel.

Pour autant, et ceux qui me suivent sur les réseaux sociaux le savent déjà, j’ai finalement abandonné ce livre à un peu plus de la moitié, ce qui ne m’était pas arrivé depuis des années. Je n’ai tout simplement jamais pu franchement entrer dans le récit. Alors, je vais tenter de vous expliquer pourquoi, mais tout d’abord je voulais aussi rajouter un point. Avant je poussais jusqu’au bout ma lecture, je lisais tout car de rares fois la fin pouvait rattraper un début qui ne m’a pas accroché. J’ai même lu dans dans nombreuses chroniques US, après avoir abandonné, que le dernier tiers de Shikasta était meilleur, mais voilà je pense ne plus avoir la patience pour terminer un livre qui ne m’accroche pas. Ici, clairement, au bout de la moitié je n’y arrivais pas, c’était trop laborieux et je m’ennuyais. Je ne noterai pas non plus ma chronique, n’ayant pas terminé ma lecture je ne me vois pas de mettre une note. Même si c’est vrai la note est un ressenti, plus une valeur de plaisir de lecture que de chiffrer la valeur d’un livre, je ne me vois pas pour autant de noter ce roman non terminé.

Surtout que, je ne le nie pas il y a de bonnes idées dans ce roman, principalement dans les nombreuses réflexions que soulève Doris Lessing. Il est dur de parler des point que cherchent à soulever l’autrice tant ils sont nombreux, mais d’une certaine façon elle cherche à soulever un miroir sur nous-même, sur note histoire pour nous rappeler, nous dévoiler le meilleur de nous mais aussi, surtout le pire. Ainsi que ce soit dans la haine, le colonialisme, la capacité que l’on a à s’entredéchirer, se détruire, à vouloir nous trouver des différences pour nous attaquer, faire la guerre, elle brasse de nombreux sujets. J’y ait ainsi retrouvé le côté qui scrute une civilisation divisée. Alors après, on pourrait lui reprocher un côté très moralisateur, principalement dans la vision donné, mais franchement dans la façon dont est construit le récit il y a une certaine logique à ce que ce soit présenté d’une telle façon. Cela amène aussi, d’une certaine façon un sentiment de coup de poing qui peut marcher. Ainsi il y a certains passages qui sont vraiment prenants et marquants et qui se dégagent tout de même de ce livre. Pour autant ces passages sont rares et surtout l’idée du regard extérieur neutre a très vite ses limites, je trouve, et entrave certaines réflexions, pire donne l’impression d’être l’inverse de ce que cherche l’autrice.

Ainsi, en reprenant la bible comme base de son roman, on se retrouve avec certains passages ou « tuer » pour le bien en devient limite nécessaire. Attention on ne parait pas être dans des situations ou il n’y a pas d’autres choix possible ou autres explications qui pourraient tenter d’amener une justification. Simplement les fameuses forces extra-terrestres, vu qu’elles sont supérieures et savent ce qui doit être fait, ont le droit d’anéantir à coup de vaisseaux des gens. Je doute que Doris Lessing voulait laisser transparaitre une telle idée, ou peut-être que par la suite il y avait une tentative d’explication, mais voilà le manque de développement à ce moment-là du récit rend l’ensemble dérangeant. Ensuite, il parait se dégager une sorte de binarité dans le récit et les idées développées, comme si tout devait obligatoirement être manichéen ce qui est quand même dommage. J’avais ainsi par moment clairement l’impression de relire justement la bible, ou Dieu est simplement remplacé par des puissances extra-terrestres, avec son manque de complexité, son besoin par cela de vouloir accentuer la morale du récit, nous rappeler que nous sommes jugés par une force supérieure ce qui, désolé de le dire, de mon côté me bloque. Je ne dis pas que le bien est le mal sont des concepts inintéressants, mais tout réduire à de tels concepts devient vite perturbant, car comment classer des meurtres au nom du bien.

Surtout, ce qui m’a le plus bloqué avec ce livre c’est tout simplement la plume ainsi que sa construction. Doris Lessing sait manier les mots, je n’en doute pas, comme je l’ai dit il y a parfois de très bons passages, mais j’ai trouvé qu’ici elle en faisait trop. Franchement je me suis clairement ennuyé durant plus des trois quarts de ce que j’ai lu. Elle parait ainsi aligner les mots les uns derrières les autres sans jamais arriver, tout du moins pour moins, à créer une image, un ressenti. J’avais l’impression d’avancer de façon laborieuse, ennuyeuse dans un univers qui peinait à se dévoiler. À l’inverse d’autres auteurs qui oublient le précepte « montre, ne le dit pas », ici l’autrice cherche tellement à montrer, sans que personne ne lui dise à un moment STOP, qu’elle étouffe le lecteur d’informations pas toujours utiles et le perd. Car oui, j’ai aussi eu l’impression que de nombreux passages n’apportaient rien et donnaient l’impression d’être présents que pour montrer qu’elle sait écrire. Ensuite je me suis senti perdu dans une construction qui donne l’impression d’une certaine incohérence, présenté comme des chroniques qui n’en sont pas et mélangeant  différentes constructions. Enfin autre point, vous devez le savoir, je suis un lecteur de SF qui aime une certaine cohérence, ainsi ici on parle de fluide, de voyages spatiaux, de zones et autres sauf que tout ce background de SF n’a d’autres intérêts que de soutenir le récit. Alors, comme je l’ai dit avec Chroniques Martiennes de Bradbury, parfois ça fonctionne, mais ici ce ne fut pas le cas, maintenant cela peut venir aussi du fait que le reste m’ait laissé de marbre.

Voilà les différentes raisons qui ont fait que j’ai préféré abandonné ce roman à un peu plus de la moitié. Je me doute qu’il doit exister un lectorat pour ce genre de récit, je n’en faisait tout simplement pas parti. Maintenant à vous de voir si vous vous laissez tenter ou pas.

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  1. Si ça peut te rassurer, moi non plus je n’abandonnais jamais un roman commencé, jusqu’ici. Mais en 2018, j’ai changé d’attitude. Trop de livres intéressants, pas assez de temps pour lire, enfin tu connais la chanson. Autant ne pas perdre son temps avec des livres qui ne nous correspondent pas.

    • C’est ça, puis il faut que je me fasse une raison, les livres qui dans les dernières pages rattrapent un début raté doivent se compter sur les doigts d’une main. Avant j’avais toujours cette appréhension de me dire que peut-être je loupe une fin exceptionnelle, mais je pense que je me suis lassé et que je n’ai plus ce remords surtout, comme tu dis, quand je vois ma PAL et les prochaines publications.

  2. jean

    Doris Lessing est avant tout un auteur autobiographique ; il faut lire le Carnet d’Or, très beau et très grand livre. Mais chercher de la SF dans son oeuvre, c’est difficile…C’est comme lire du Modiano pour y chercher une intrigue policière…

    Elle serait très amusée ou horrifiée par l’écriture inclusive, elle qui disait : « après avoir fait une révolution, beaucoup de femmes se sont fourvoyées, n’ont en fait rien compris. Par dogmatisme. Par absence d’analyse historique. Par renoncement à la pensée. Par manque dramatique d’humour »….

    • Le hic c’est qu’il est vendu comme de la SF par l’éditeur. Après, comme avec Bradbury, je n’attends pas obligatoirement de la SF pure et dure, des concepts, des idées qui viennent soutenir un récit et des réflexions peuvent m’accrocher. Le soucis c’est quand le récit devient pour moi laborieux et les idées mal exploitées, j’ai l’impression d’être laissé de côté.

      Je ne doute pas que d’autres écrits de l’autrice sont beaucoup plus puissants et marquants.

  3. Je ne m’embête plus. A moins que cela soit dans le cadre d’un SP, je ne termine pas un bouquin qui me gonfle. Et cela sans aucun remord!
    La lecture est faite pour le plaisir dans notre genre, pas pour se flageller avec des saucisses plates.

    • J’avoue n’avoir jamais essayé ce genre de flagellation 😛
      Sinon plus sérieusement je suis du genre à vouloir terminer quelque-chose que j’ai débuté, maintenant comme tu le dis la lecture est faite pour le plaisir, s’il n’y en a pas ça n’a finalement que peu d’utilité.

      • Ah! tu ne pratiques pas ?….
        Tu as bien raison, c’est assez stérile comme coutume. 😉

        Oui, il y a des années que je ne me prends pas la tête à achver un livre qui ne me plaît pas. L’exception le mois dernier : Black Bottom, mais comme je le lisais dans le cadre d’un prix, je suis allée jusqu’au bout.

        • Non, mais je suis ouvert à toute découverte si ça a un intérêt 😀

          Après il y a aussi plusieurs niveau de blocage, Shikasta franchement je trouvais ça lourd et extrêmement long, mais par exemple Rétrograde que j’aurai pu arrêter aussi car finalement pas intéressant, vu que ça se lisait vite et rapidement et que le roman n’était pas long j’ai terminé. Maintenant oui, je pense qu’aux vues de ma PAL et des publications qui arrivent qu’il faut que j’apprenne à ne plus me prendre la tête.

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