le paradoxe de fermiRésumé : Dans son repaire situé quelque part à l’est de l’arc alpin, Robert Poinsot écrit. Il raconte la crise systémique dont il a été témoin : d’abord le salaire qui n’arrive pas, les gens qui retirent leurs économies, qui s’organisent pour trouver de quoi manger, puis qui doivent fuir la violence des grandes villes et éviter les pilleurs sur les principaux axes routiers.
Robert se souvient de sa fuite à Beauvais, de son séjour dans une communauté humaniste des bords de la mer Baltique et des événements qui l’ont ramené plus au sud, dans les Alpes.
Quelque part dans le récit de sa difficile survie se trouve peut-être la solution au paradoxe de Fermi, à cette célèbre énigme scientifique : dans un univers aussi vaste que le nôtre, l’espèce humaine ne peut pas être la seule douée d’intelligence ; alors où sont les autres, où sont les traces radio de leur existence?

Edition : Denoël Lunes D’encre (Paru le 08/01/2015)

 

Mon Avis : La première fois que j’ai entendu parler de ce livre, ce qui m’a directement attiré c’est sa couverture, illustrée par Aurélien Police, que je trouve franchement superbe et qui attire l’oeil. Ajouter à cela un résumé qui annonçait clairement un roman post-apocalyptique, genre que j’apprécie, ce livre ne pouvait donc que finir sa course dans ma PAL. Par conséquent quand on m’a proposé de le découvrir, je me suis rapidement laissé tenter.

Commençons déjà par situer ce livre dont, finalement, j’ai du mal à le classer en roman, malgré sa construction fictive sous la forme d’un journal d’un homme qui a vécu la fin de la société. Il faut dire que le style se révèle très simpliste, répétitif, avec une assise plus scientifique et froide que littéraire, ce qui fait que j’ai plus de faciliter à considérer cette histoire comme une étude de cas, voir un essai limite spéculatif qui partirait ainsi avec comme point de départ une crise boursière dont la société, telle qu’on la connait, ne se relèverait pas et s’effondrerait sur elle-même. Ce n’est en rien une critique, cela n’empêche pas la lecture et l’appréciation de ce roman, juste si vous cherchez un récit plus « romancé » et plus « touchant », ou si vous cherchez un style travaillé vous risquez de vous sentir frustré par ce roman.

Mais alors qu’en est-il de ce paradoxe? J’avoue qu’une fois la dernière page tournée je dois bien avouer que la lecture s’est révélée plutôt plaisante avec de bonnes idées et surtout de nombreux aspects glaçants, mais que je suis loin du roman marquant, dont j’ai entrevu passer quelques retours sur d’autres sites. Une chose qu’on ne pourra pas enlever au récit c’est sa vision de l’effondrement de la société qui se révèle tout à fait frappante, saisissante et surtout tellement réaliste. Ce personnage principal qui se retrouve limite à « régresser » au fil des pages ne peut que surprendre le lecteur. Cette possibilité que l’homme, tellement dépendant des technologies,ne puisse se relever de la disparition de celles-ci, où les inégalités vont s’accentuer pour aboutir à de nombreuses scènes de guérillas, de pillages et de brigandage. On sent que l’auteur a longtemps réfléchi à son sujet, l’a parfaitement collé à notre société et a pu ainsi le développer tout en cherchant à nous faire réfléchir. On se retrouve donc ainsi à se poser de nombreuses questions que ce soit sur notre façon de traiter la nature, notre environnement, mais aussi sur notre capacité à survivre sans certaines évolutions ou bien encore sur la situation politique et géopolitique qui n’est pas sans rappeler certaines informations actuelles tant les tensions sont présentes dans l’actualité.

Pourtant, malgré ses points forts percutants et efficaces de nombreux aspects m’ont laissé perplexe. Dans la construction de sa catastrophe l’auteur parait ne pas savoir sur quel pied danser, oscillant entre des explications larges qui collent bien car elles offrent plusieurs hypothèses que le lecteur peut imaginer tout seul et parfois une tentative plus pointue d’étayer sa démonstration, qui parfois a eu du mal à m’accrocher car trop simpliste. Je prends pour exemple le chapitre qui parle de la chute d’Israël face à une coalition de pays de la péninsule arabique telle que la Syrie, l’Irak, la Jordanie, la Libye et d’autres, le tout avec l’aval de l’Iran. Géopolitiquement cette coalition me dérange tant elle parait peu probable, même si pas impossible, et vu que l’auteur ne développe pas plus en profondeur je suis resté frustré. C’est dommage, car cela me donne plus l’impression qu’il cherche plus à faire avancer son histoire simplement tel qu’il l’entend. Autre point qui me laisse perplexe c’est cette représentation aussi un peu facile de l’humanité sans logique, comme par exemple ce chapitre sur l’eau potable. Vu qu’il n’y a plus d’électricité on peut donc potabiliser l’eau vu que, pour l’auteur, les stations d’épuration d’eau ont besoin pour cela de machines et de produits chimiques, sauf que, et c’est peut-être mon côté scientifique qui parle, il existe des STEP purement biologique et sans machines et qu’en cas de dernier recours on peut toujours tenter par l’UV dans des bouteilles plastiques ou par filtres charbons même si, c’est vrai, ce n’est pas parfait. Je trouve cela dommage car on a l’impression que parce-que le « cadre moyen cultivé » ne sait pas faire obligatoirement personne ne sait faire. Pareil pour les passages sur l’agriculture ou encore sur la nourriture.

Puis arrive la conclusion, cette réponse que l’auteur cherche à faire passer concernant le paradoxe de Fermi, qui se révèle tout à fait plausible malgré, c’est vrai, son côté pessimiste. Une conclusion intéressante qui cherche, d’une certaine façon, à sonner l’alarme de notre façon de gérer notre planète et nos vies. Sauf que voilà deux choses m’ont laissés perplexe, c’est que d’une on la voit venir au vu du titre et de la façon dont l’auteur construit son récit et de deux j’ai trouvé qu’elle manquait un peu de débat. Pourtant l’auteur prend bien 10 pages à développer son hypothèse, reposant sur un dialogue de groupe et, comme je l’ai dit, elle est tout à fait plausible, mais voilà c’est censé être un groupe instruit et il n’y a quasiment pas un seul débat contradictoire, alors que moi je me sentais frustré avec la dizaine d’argument que j’avais en tête mettant à mal cette théorie. Après je sais parfaitement bien qu’une telle théorie n’a que deux possibilités d’être résolue, soit un jour la vie extraterrestre apparait soit on arrive à prouver avec certitude qu’elle n’existe pas (et encore la certitude a aussi ses limites), mais voilà voir l’argumentation acceptée si facilement me dérange, tant elle reste justement discutable.

Après on pourrait croire que je n’ai pas apprécié ce roman, c’est faux, il reste un minimum agréable, son côté post-apo est clairement réussi et fait froid dans le dos. Je ne dirai pas non plus, en fermant ce livre, que certaines questions ne continuent pas à trotter dans ma tête. Le héros principal, malgré un côté froid et un certain manque de touche émotionnelle, arrive effectivement à nous faire réagir et à nous passionner un minimum sur notre société, son repli dans la haine et la violence, et ses nombreuses péripéties. Sauf que voilà, tout simplement je pense que mon esprit scientifique ne se sent pas complètement convaincu par certains aspects trop simplistes et mon esprit de controverse trouve que l’auteur construit trop son récit pour tenir la main du lecteur et mettre en avant ses arguments, sans jamais chercher à les pousser à bout. Au final une lecture pas mauvaise, mais qui n’a pas répondu complètement à mes attentes.

En Résumé : J’avoue une fois la dernière page de ce roman tourné, que je ressors pas complètement convaincu par ma lecture. Certains aspects se révèle réussi, comme par exemple ce travail minutieux sur l’effondrement de notre société et sa capacités à s’auto-détruire qui se révèle très réaliste et limite glaçant, ou encore sur les nombreuses réflexions qu’il cherche à mettre en avant de façon intéressante, mais voilà d’autres passages m’ont laissé perplexe. Je pense principalement a certaine tentative d’explication de la catastrophe qui, dans l’état de construction du récit et des éléments fournis, ont du mal à me convaincre ou bien encore sur cette impression que l’humanité entière manque de jugeote et de logique sur certains aspects qui me paraissent pourtant gérables. Puis arrive la conclusion, le travail qui mène à la réponse de l’auteur au paradoxe de Fermi qui ne manque pas d’intérêt et qui se révèle plausible mais dont je trouve dommage qu’il soit finalement devinable rapidement et qui, surtout, manque de débat contradictoire, ce qui m’a légèrement frustré. Au final un roman plutôt sympathique, avec de bons passages, mais dont finalement j’attendais plus.

 

Ma Note : 6,5/10

 

Autre avis : Lune, Cornwall, Ptitetrolle, Elessar, …