l'esprit du melkineRésumé : Il a quinze ans et s’appelle Prodige. Encore enfant dans sa tête, il passe son temps les yeux levés vers le ciel. Le fils d’Ismaël est le dernier porteur d’un rêve qui appartient désormais au passé. Alors que le conflit des Fréquences entame sa dernière phase, alors que la Technoprophète savoure son triomphe imminent sur le Cheik noir et les conditionnements, un adolescent n’aspire qu’à rejoindre les étoiles.
Pour y réussir, il aura besoin du Melkine et de ses professeurs. Le navire a disparu mais, malgré le chaos général, il reste capable de miracles.

Edition : L’Atalante

 

Mon Avis : Il y a à peu près un an je me lançais dans ce cycle de Space-Opera qui me tentait vraiment. Après un premier tome intéressant, mais un peu introductif (ma chronique ici) et un second tome que j’ai trouvé vraiment efficace avec son univers fascinant et ses réflexions intéressantes (ma chronique ), j’avais hâte de voir ce qu’allait proposer l’auteur avec ce dernier tome. Vu que les Utopiales proposait ce livre en avant-première, je me suis dépêché de le faire entrer dans ma PAL. À noter la magnifique couverture, toujours illustrée par Manchu, qui reste dans le même esprit que les deux premiers tomes.

Quinze ans ont passés depuis la fin du second tome et donc trente ans depuis la fin du premier. La guerre des fréquences touche à sa conclusion, la technoprophète dominant le cheik noir et la dernière bataille approchant. Les lignes d’intrigues développées dans les tomes précédents commencent donc à dévoiler leurs conclusions, proposant toujours autant de machinations, de rebondissements et de complots. Un développement de l’histoire qui se révèle vraiment efficace même si assez linéaire dans sa construction et ses surprises.

Car voilà, ce qui marque dans ce récit n’est pas totalement l’histoire, même si elle sert de support et se révèle cohérente et intéressante, non ce qui happe le lecteur c’est la véritable fresque humaine que l’auteur nous dévoile au fil des pages, nous plongeant dans ce Space-Opera avec fascination et passion. Le rythme du récit se révèle posé et attentif, ce qui permet ici clairement de poser et développer les différents points importants ainsi que travailler l’émotion et dévoiler l’univers, mais pourrait peut-être en rebuter certains, donnant l’impression de stagner. Ce qui est dommage, car ce récit ouvre tellement de possibilités.

Rien que les personnages se révèlent vraiment fascinants, on les retrouve tous changés après tant d’années, ils ont évolué. La vie ne leur a pas toujours fait de cadeaux. Ils se révèlent toujours aussi complexes, denses et ambigus et reposent dans ce tome clairement sur les émotions, les sentiments et l’espoir qu’ils arrivent à partager et surtout à transmettre au lecteur. On retrouve aussi avec plaisir des anciens personnages du premier tome, même si parfois on aurait aimé en savoir plus sur ces années perdues. En tout cas les personnages ont un rôle prépondérant dans l’histoire, le lecteur s’attachant clairement à eux, à leurs réflexions, leurs besoins, leurs envies, leurs souffrances et surtout à leurs rêves. J’aurai juste un léger reproche concernant la technoprophète, elle tombe un peu dans le manichéisme dans ce tome ne servant que comme symbole de l’ennemi dans l’histoire, là où elle a toujours été au final un rêve brisé, mais rien de bien dérangeant.

Autre point vraiment intéressant, efficace et soigné dans ce roman ce sont les réflexions misent en avant par l’auteur concernant l’influence de la communication instantanée, principalement celle de banquise, sur la vie des peuples, sur leurs conditionnements. Elle cherche à les abrutir, en reniant leurs passés, détruisant tout aspect de pensée, de diversité, les forçant à tous rentrer dans un seul et unique moule creux et sans âme. Mais aussi la mise en avant de l’influence du passé dans la construction de soi et de son avenir, ou bien encore l’apprentissage et la découverte par soi-même. Des réflexions vraiment marquantes, mais surtout misent en avant et développées de façon intelligentes poussant le lecteur à se poser des questions sans jamais non plus trop le forcer.

Mais surtout là où l’œuvre a réussi à me toucher c’est, d’une certaine façon, en me faisant rêver d’étoiles. En me rappelant l’importance de simplement lever la tête et les admirer, se rendre compte de leurs beautés, de notre insignifiance. Le roman nous rappelle à travers un être simple tel que Prodige que notre vie finalement dépend de nos rêves, de nos véritables liens et pas simplement d’une reconnaissance virtuelle ou d’une liberté vide de sens et de compréhension. La conclusion pleine d’espoir se révèle vraiment accrocheuse, même si peut-être légèrement trop happy-end par certains aspects.

L’univers développé dans le livre montre justement bien ces dégradations misent en avant par ce travail des fréquences, remplaçant des mondes qu’on avait connus flamboyants et fascinants par des mondes en plein abrutissement, qui ne vivent que par procuration de leurs écrans, cherchant le regard et l’amour de gens qui ne sont que virtuels ou ne les regardent pas. Des planètes qui se croient libres, mais se révèlent en fait manipulés, où les différents peuples se révèlent perdus, se croyant aimés par une technoprophète qui ne cherche en fait qu’à imposer son point de vue. Les différents conditionnements et leurs effets néfastes, mais prônant une diversité, ont explosés, laissant place à quelque chose sans âme, sans esprit, des mondes où l’Histoire, les cultures et les mythes disparaissent au profit d’un message de rêve et de liberté factice, vide de sens et de racines. Parfois l’auteur va peut-être un peu trop loin, c’est vrai, dans sa façon de présenter cette évolution.

Alors, bien sûr, quelques points paraissent de temps en temps traités trop rapidement, des personnages évoluent parfois trop vite, des situations auraient pu mériter d’être un peu plus développés, ou encore certains retournements de situations se révèlent sans surprises. Mais voilà le tout est vraiment balayé par l’ambiance et le fait que l’auteur arrive à faire rêver, à nous emporter dans son univers plein d’étoiles et de mystères. Comme je l’ai dit ce cycle est une fresque, un roman choral à la fois fascinant, empli de rêve et d’étoiles, le tout porté pas une plume toujours aussi soignée, poétique et efficace qui nous happe vraiment dès les premières phrases. Le message portera sûrement différemment selon le lecteur, en tout cas pour moi il m’a touché.

Ma seule véritablement critique, plus globales, concerne le fait d’avoir découpé le livre en trois, car mis à part trois couvertures de Manchu l’intensité de l’histoire aurait gagné à ne pas être séparée. Mais bon simple avis personnel. En tout cas je sors ravi de ma lecture de ce troisième tome et de ce cycle qui a vraiment réussi au final à m’emporter.

En résumé : J’ai passé un excellent moment de lecture avec le troisième tome de ce cycle, qui vient ainsi clôturer les différentes intrigues misent en avant depuis le premier tome. Une intrigue au rythme posé et parfois un peu linéaire, mais qui m’a vraiment emporté par son message d’étoiles et de rêves ainsi que par ses réflexions vraiment soignées et intelligentes sur l’influence de la technologie et de la communication dans nos vies, sur notre passé et notre avenir. Il est parfois bon de simplement lever la tête et admirer le ciel. On retrouve un univers en pleine décadence qui colle parfaitement au message que cherche à faire passer le roman, même si parfois il pousse un peu loin. Les personnages sont toujours aussi fascinant, complexes et attachants, même si j’ai trouvé que la technoprophète tombait parfois un peu dans la caricature de la méchante. Quelques petits points m’ont dérangés comme certains aspects traités trop rapidement ou encore un ou deux retournements de situations qui manquent de surprises, mais rien de bien gênant tant au final j’ai été emporté par le message véhiculé par ce cycle. Le seul commentaire que je ferai, c’est que je trouve dommage d’avoir coupé cette histoire en trois livres.

Ma Note : 8,5/10