arslanRésumé : Ancien président du Turkestan, général moitié ouïghour moitié ouzbek, Arslan a conquis le monde. Pour une raison obscure, c’est dans l’insignifiante petite ville américaine de Kraftsville, Illinois, qu’il a décidé de fêter sa victoire finale.
Dès lors, le plus important n’est pas tant qu’Arslan ait conquis le monde, mais ce qu’il va faire avec. Une perspective effrayante… quand on voit les nouvelles règles qu’il impose aux habitants de Kraftsville.

Edition : Denoël Lunes d’Encre (paru le 09/06/2016)
Traducteur : Jacques Collin

 

Mon Avis : J’avoue, ce roman m’intrigue depuis la première fois que j’en ai entendu parler quand les éditions Denoël ont annoncé il y a quelques mois sa publication pour la première fois en France. J’avais aussi déjà vu passer ce roman dans des listes de classiques de la SF sur des sites anglais, mais sans jamais franchement me pencher dessus. Par conséquent quand on m’a proposé de découvrir ce roman, j’avoue m’être rapidement laissé tenter. A noter la couverture, illustrée par Aurélien Police, que je trouve très réussie.

Arslan est un général du Turkestan et il a conquis le monde entier. Kraftsville, petite bourgade perdue des Etats-Unis a du mal à y comprendre ce qui arrive, mais surtout pensait rester loin de ce conflit. Sauf que voilà, Arslan a décidé de faire de cette ville son pied-à-terre et va par la même occasion amener sont lot de règles et d’horreur. Je dis souvent qu’il m’est difficile d’offrir mon ressenti sur un livre, et c’est vrai pour tous les romans que j’ai lu, tant cela repose sur de nombreux aspects et reste subjectif. Arslan fait ainsi parti des plus compliqués à chroniquer que j’ai croisé, tant il m’a paru intéressant sur de nombreux points et sur de nombreuses réflexions, mais tant il a aussi réussi à me dérouter et, il faut le dire, m’a paru dérangeant voir « repoussant » (pas trouver le mot exact que je cherchais). Je pense d’ailleurs que beaucoup de lecteur n’accrocheront pas au récit justement à cause de ça. Après c’est peut-être aussi ce côté choc et sans concession qui peut en faire sa force, mais je ne m’avancerai pas sur ce point.

Déjà, on va commencer par un point qui, je trouve, mérite d’être clarifié. Si vous vous vous lancez dans ce roman pour la partie conquête du monde, alors passer votre chemin. Là n’est pas clairement le propos premier du récit, l’auteur se servant de ce point pour développer ses idées et tenter de faire réagir le lecteur. Pire, les quelques explications que l’auteur tente sur le sujet paraissent irréaliste, ce qui en devient même légèrement frustrant durant la lecture. Même si on se remet dans le contexte de l’époque de sa publication en VO, où on est en pleine guerre froide, avec la pression du nucléaire et de ses bombes et surtout une défaite de l’armée US au Vietnam, ce qui fragilise l’Amérique qui perd de sa superbe ; le fait que Arslan se retrouve maitre du monde reste trop simpliste et trop facile. C’est dommage, j’aurai préféré que le récit garde le mystère plutôt que d’offrir des réponses qui paraissent souvent improbables d’un point de vue géopolitique voir pratique. Après comme je l’ai dit ce n’est pas là l’intérêt du récit puisque la question soulevée est surtout : qu’est ce qui se passe après et les horreurs que cela laisse, mais je comprends parfaitement que cela puisse bloquer.

Maintenant rentrons dans le vif du sujet, je vais essayer de faire au mieux pour vous expliquer mon ressenti. L’histoire va ainsi se dérouler sur une double narration, la première de Franklin Bond directeur de l’école locale qui va travailler pour le « dictateur » tout en se rebellant et tenter de libérer la ville, et la seconde Hunt Morgan jeune enfant qui est abusé par Arslan qui en fait son jouet, tout en tentant de l’éduquer. Ce que je peux déjà vous dire c’est que si vous lisez les deux premiers chapitres, vous verrez clairement dans quoi vous entrez. Le premier pose clairement cette ambiance dérangeante, avec la découverte d’Arslan, tyran et violeur que ce soit dans le sens littéral comme mettant à ses pieds le pays le plus puissant du monde. L’auteur évite par contre de tomber dans le trop glauque ou le trop visuel, mais on est tout de même dérangé par ce personnage par son idéologie et ce qu’il fait subir. Le second chapitre on découvre quel est le but de tout cela, et on se rend compte que ce roman a pour but, je pense, de déranger pour mieux questionner que ce soit sur notre société, notre vision du monde comme dans aussi notre façon de voir et de gérer les autres pays. Qu’on apprécie ou pas ce roman, je pense qu’il ne laissera pas indifférent et surtout qu’il reste terriblement d’actualité.

L’auteur en effet nous propose ainsi de se poser de nombreuses questions. Je pense que le premier point recherché par est de montrer la guerre dans son horreur parfois la plus pure. En effet on est un peu privilégié, que ce soit les US, l’Europe et d’autres pays encore, la guerre on la voit surtout dans les médias, elle ne nous touche pas vraiment, et reste éphémère. D’une certaine façon je dirai que ce récit nous en montre les conséquences, les privations, les contraintes, les violences à la fois physiques et psychologiques et tente de montrer que nous aussi nous ne sommes pas à l’abri. Alors ça reste un peu au second plan, mais je ne sais pas, j’ai été marqué par cette idée. Une sorte de dénonciation, de tentative pour bousculer le lecteur. L’autre point que soulève Arslan est plus philosophique, considérant l’homme comme un prédateur sans barrières, une évolution qui a mal tournée et a rendu celui-ci beaucoup trop dominant et exterminateur que ce soit dans ses actes, dans sa consommation à outrance des ressources, comme dans sa surpopulation. Arslan considère ainsi un peu l’Homme comme un nuisible qu’il faut éliminer. Tort ou raison là n’est pas le but recherché, mais plus les questions qu’on se pose devant cette idée. D’un point de vue des actes du roman, de nouveau l’auteur tombe un peu dans la facilité, les plan d’Arslan manquant quand même de profondeur, même si là par contre ça ne dérange pas, puisqu’il porte bien le message souhaité je trouve. Autre point intéressant, même si j’ai trouvé peu développé ici, c’est la façon dont les autres réagissent à cette intrusion, aux ignominies subies que ce soit par fronde, par soumission, par acceptation ou par lâcheté.

A partir de là on va ainsi découvrir trois personnages, deux comme narrateur, comme je l’ai dit, et Arslan à travers leurs yeux. Bond est ainsi l’américain pure souche, le héros religieux qui ne se laisse pas marcher sur les pieds, mais qui sait reconnaître ses limites et va tenter de s’en servir pour lancer une rébellion, être le coeur de ce qui va faire tomber cette invasion. Arslan, lui, porte le rôle de l’envahisseur, je ne reviendrai pas sur ses idées je les ai déjà développées, mais il est le monstre, le machiste, le violent et pourtant plus on avance plus on se rend compte qu’il est humain avec les nuances que cela offre. C’est d’ailleurs cette dualité qui se révèle aussi dérangeante, il n’est ni une bête, ni un démon, mais un homme qui a une vision du monde et une idéologie complètement différente. un homme qui a aussi connu la perte et la souffrance. Certes on le hait pour ce qu’il fait, mais il a ses raisons, qu’on les comprenne ou pas. Ensuite vient Hunt, l’adolescent construit en partie sur les bases de son éducation et en partie de la souffrance qu’à occasionne Arslan en faisant de lui son objet. Il se sent trahi des deux côtés, et il a raison, et doit se construire une personnalité. On découvre un héros désabusé autant du monstre que de sa famille et de ses amis. Un enfant qui a tout perdu, au point de plonger dans un syndrome de Stockholm, mélange d’amour et de haine pour son bourreau. Un personnage que j’ai trouvé perturbant, mais pourtant dans un certain sens captivant. Ce sont ainsi trois personnalités complètement différentes qu’on découvre, qui ne manquent pas d’intriguer et d’accrocher.

Sauf que voilà, on rentre aussi dans ce qui est un des points faibles que je trouve marquant du roman, la position de la femme. Il manque un personnage féminin qui ressorte car, ici, elles se révèlent être soit des objets de plaisirs ou d’abus, soit des mères et des cuisinières. C’est frustrant. Alors certes, il s’agit d’un roman des années 70, mais quand même je trouve cela clairement dommage. Ensuite autre point qui m’a légèrement dérangé, le fait de ressentir certaines longueurs vers le milieu du livre, comme si l’auteur avait du mal à se renouveler, mais bon là rien de non plus trop perturbant. Enfin dernier point qui peut bloquer, la façon dont l’auteur gère Arslan dans la dernière partie du roman, je ne vous dis rien pour ne pas spoiler, mais qui franchement a de quoi freiner certains. A chacun de voir. Le style de l’auteur se révèle simple, intelligente et efficace. Au final Arslan est un roman intelligent, dérangeant, perturbant, fort et qui devrait ne pas laisser indifférent dans ce qu’il décrit comme dans ce qu’il traite. Encore maintenant je ne sais pas si j’ai aimé ce roman, ou s’il m’a dérangé. C’est d’ailleurs pour cela que je ne lui mettrai pas de note. A vous de voir maintenant en fonction de ce que je viens de dire.

En Résumé : Arlsan est u roman assez étranger, qui m’a à la fois captivé par les idées qu’il soulève et qu’il développe, mais qui m’a aussi paru dérangeant et perturbant au point de me bloqué sur certains aspects. Déjà l’idée d’Arslan qui domine le monde manque de réalisme, certes ce n’est pas l’intérêt premier du livre, cherchant plus à faire réfléchir sur les conséquences, mais c’est parfois tellement frustrant. Concernant les réflexions ce roman n’en manque pas que ce soit sur la guerre, sur notre société ou bien encore sur l’Homme et sa capacité à détruire, il pousse le lecteur à se questionner, à réfléchir, même si certains aspects sont peut être un chouïa simpliste. On suit au fil des pages deux narretrus, Bond et Hunt, qui nous permettent, à travers leur regard de découvrir Arslan. On découvre ainsi trois personnalités complètement différentes, chacun ayant leurs idéologies et leurs philosophies qui nous montre aussi un Arslan humain. Certes on le hait d’une certaine façon, mais il a des raison, il n’est pas un démon qui rêve de détruire le monde simplement parce-que c’est fun. Je regretterai par contre aussi certaines longueurs, mais surtout le fait que la position de la femme soit si mal représentée. Un autre point peut surprendre et bloquer, le choix que prend l’auteur vis-à-vis d’Arslan dans le dernier quart, mais je n’en dirai pas plus pour ne pas spoiler. Le plume de l’auteur est simple, efficace et entrainante. Voilà Arslan je ne peux ni tenter le recommander, ni tenter de le déconseiller, faite-vous votre avis si les points que j’ai avancé vous intéresse. D’ailleurs je ne lui mets pas de note.

 

Ma Note : XXXX