After Atlas – Emma Newman

Résumé : Carlos Moreno est un esclave. Son contrat d’inspecteur auprès du ministère de la Justice l’engage jusqu’à la fin de ses jours, ou presque. Quand sa supérieure lui demande d’enquêter sur la mort suspecte d’Alejandro Casales, l’un des plus puissants leaders religieux de la planète, il n’a d’autre choix que d’accepter. Mais pourra-t-il garder la distance nécessaire à l’exercice de ses fonctions, quand la victime n’est autre que l’homme qu’il aimait jadis comme un père et qui l’a sauvé lorsque sa mère, Lee Suh-Mi, est partie dans les étoiles à bord de l’Atlas ?

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Mon Avis : J’ai découvert Emma Newman il y a un peu moins d’un an maintenant avec son premier roman publié en VF : Planetfall. J’avais passé un très bon moment de lecture avec ce récit de science-fiction intelligent, proposant une intrigue entraînante et bien portée par des héros intéressants et attachants (ma chronique ici). Il était donc logique que je me laisse rapidement tenter par ce After Atlas, nouveau roman se situant dans le même univers que Planetfall, mais offrant des personnages différents. Concernant la couverture, elle reprend celle en VO et reste dans le même style que celle du précédent roman. Alors, il est possible de lire ce roman de façon indépendante sans soucis, même si je trouve que ce serait dommage concernant la compréhension de certains points qui pourraient être vus différemment si on a lu Planetfall.

Ce roman nous plonge ainsi sur la planète terre, 40 ans après le départ du vaisseau Atlas qui a vu Lee Suh-Mi, l’éclaireuse, partir sur une planète inconnue trouver Dieu, aboutissant ainsi aux évènements de Planetfall. On suit ici Carlos, qui a été abandonné bébé par sa mère qui est partie sur l’Atlas. Son père étant devenu dépressif avec le temps, il a été obligé d’apprendre à se débrouiller de lui-même. Aujourd’hui esclave sous contrat du MdJ, il est devenu un excellent inspecteur faisant le maximum pour payer sa dette et se libérer de son contrat. Il est ainsi envoyé sur l’enquête du meurtre d’Alejandro Casales, puissant leader du Cercle, « secte » que Carlos a bien connu pour y avoir séjourné plus de 10 ans au point d’avoir connu comme mentor Alejandro et de l’avoir, d’une certaine façon, considéré pendant un temps comme son second père. J’ai à nouveau passé un bon, voir un très bon moment de lecture avec ce roman, même si je dois tout de même bien admettre qu’il n’a pas non plus la puissance de Planetfall.

On plonge ainsi ici dans une enquête policière qui va finalement, au fil des pages, se révéler bien plus qu’un meurtre sordide. Je me suis ainsi rapidement retrouvé happé par la narration de l’autrice qui, sans se révéler révolutionnaire dans son évolution, s’avère très prenante et efficace. On a beau être dans une enquête construite de façon classique, Emma Newman maîtrise clairement son récit pour nous offrir quelque-chose de tendu et de captivant, qui monte en tension au fil des pages, des rebondissements et des révélations. Tout comme Planetfall, c’est surtout dans les mystères que ce récit gagne en intérêt, en effet plus on avance plus on se rend compte que quelque-chose cloche dans la vision d’ensemble. Certes la résolution du meurtre ne manque pas d’attrait, mais c’est dans tout ce qui tourne autour que le récit gagne en intérêt. Ajouter à cela une narration à la première personne qui rend l’ensemble très immersif, cela fait que j’ai eu du mal à lâcher ce livre.

L’un des gros points forts vient, selon moi, de l’univers qui est construit au fil des pages. Déjà dans un premier temps j’ai trouvé très prenant tout ce qui concerne l’aspect technologique et les influences que cela peut avoir sur chacun. La majorité des gens sont connectées directement à travers une puce dirigée par une IA, sont ainsi toujours présents en ligne et sont plus ou moins visibles selon leurs envies, mais aussi et surtout selon leurs fortunes. Cela influence obligatoirement la façon de communiquer, la notion de vie privée, mais aussi accentue les différences de classes. La nourriture naturelle a quasiment disparu chez les moins aisés pour de la nourriture imprimée dont, finalement, on ne sait que peu de choses, sauf qu’elle a soit-disant a le même goût que la vraie. Une dégradation de qualité acceptée par tous. La seule distraction que connaissent les gens est l’immersion dans des jeux vidéos plus ou moins plombés de pubs, selon ce qu’ils peuvent payer. Les technologies sont dans la majorité des cas devenues aussi plus pointus, comme le montre tout ce qui permet à notre héros de résoudre l’énigme, mais a aussi pour effet de jouer clairement sur les libertés de chacun ce qui fait obligatoirement se questionner le lecteur. Surtout l’ensemble est cohérent, plausible et ne manque pas de nous faire réfléchir sur notre monde actuel, notre capacité parfois à accepter certaines choses, certaines améliorations, pour une meilleure sécurité ou pour le plaisir, mais qui pourrait tout aussi bien devenir dans un avenir proche une contrainte.

L’aspect politique est aussi très intéressant à découvrir dans cette toile de fond que construit Emma Newman. La politique parait ainsi avoir quasiment disparu, les pays laissant la place à des conglomérats de nations dirigés un peu comme des entreprises, où le pouvoir repose non pas sur les hommes politiques et les lois, mais sur des avocats et des contrats. Les classes sociales ont complètement été revue entre les riches, les citoyens qui ne conservent que quelques libertés et les « esclaves » qui après avoir été rééquilibrés sont « vendus » à différents types d’organisations, allant des plus sordides au plus utiles, et qui doivent rembourser leurs dettes en travaillant. Certains d’entre eux peuvent se voir inscrire dans leurs contrats des clauses particulières leur permettant de rallonger leurs dettes en échange d’extras. Les autres doivent subir les envies et contraintes de leurs propriétaires. Il y a ainsi une notion de désenchantement, de décadence, dans cet avenir, avec en point d’orgue le départ de l’Atlas qui a changé le monde. La planète Terre parait aussi être complètement perdue aux mains des plus riches, où la liberté à ces limites, où la productivité et la richesse sont la norme et où le plaisir est une denrée rare. Chacun est devenu un produit de la société, échangeable, exploitable dont l’individualité à quasiment disparu. Les tensions entre ses nouveaux pouvoirs, ses nouveaux états, sont par contre à leurs paroxysmes, chacun cherchent finalement à prendre l’ascendant sur les autres. Un avenir fictif qui ne laisse pas indifférent tant il parait crédible et vrai. On se retrouve ainsi à se poser de nombreuses questions sur ce que l’on souhaite vraiment, ce que l’on est prêt à accepter.

Au milieu de tout cela on suit l’inspecteur Carlos Moreno, pur produit du système qui est bloqué par un contrat qui le lie le rend esclave du MdJ. On découvre ainsi un personnage très intéressant, soigné, complexe, empli d’une colère sourde contre un système qui l’a toujours broyé. Il est pourtant obligé d’en jouer les règles, de cacher ses véritables sentiments pour espérer un jour pouvoir avoir sa propre vie. C’est franchement un héros qui ne manque pas de sympathie et d’originalité, que ce soit dans sa vision du monde, dans les blessures qu’il essaie de cacher, mais aussi dans sa relation avec le vaisseau Atlas et ce que cet évènement a apporté à sa vie directement et indirectement. Clairement j’ai été accroché par ce héros, il m’a donné envie d’en apprendre plus, pour autant il n’a pas, je trouve, la puissance de Renata et n’a pas réussi à autant me toucher. Attention, cela n’enlève en rien les qualités de ce héros, mais voilà son côté froid et le fait qu’il ne se lie jamais avec les autres, autrement que par un jeu de manipulation, le rend un peu distant, même avec le lecteur. Cela ne l’empêchera pas de nous donner envie de suivre ses aventures, de découvrir ce monde, d’en dévoiler les failles et les réflexions. Les personnages secondaires sont solides même si par moment ils manquent peut-être un moment de profondeur. La narration centrée sur le héros provoque ainsi cet effet, ce qui par moment se révèle légèrement dommage comme la relation du héros avec Dee, mais rien de trop bloquant.

J’ai par contre noté une ou deux facilitées dans l’évolution de l’intrigue, mais de ce côté là rien de très dérangeant, tant l’ensemble s’avère soutenu, efficace et entraînant minimisant clairement ces points. J’aurai par contre un regret concernant la conclusion qui, certes, s’avère très intéressante dans les nombreuses révélations qu’elle apporte, dans son traitement, mais aussi dans les surprises qu’elle amène. Elle a ainsi ce côté tendu et captivant, mais voilà pour ma part la façon dont est traité le cas de Carlos au milieu de tout cela m’a paru être abordée de façon trop simple et rapide. J’avais l’impression que l’autrice paraissait limitée en pages et qu’elle devait par conséquent conclure, ce qui m’a légèrement frustré. Après, ce After Atlas reste tout de même un très bon roman, intelligent, ne laissant pas le lecteur indifférent, bien porté par une plume efficace, entraînante et soignée et même s’il souffre peut-être de la comparaison avec Planetfall qui, pour moi, était d’un niveau au-dessus, mérite tout de même, je trouve, d’être découvert. Je lirai sans soucis d’autres écrits de l’auteur surtout qu’un troisième roman dans le même univers devrait être publié prochainement en VO.

En Résumé : J’ai passé un bon, voir un très bon moment de lecture avec ce roman qui se situe dans le même univers que Planetfall, mais avec d’autres personnages. Le récit est ainsi construit comme une enquête policière qui va se révéler offrir bien plus. La construction est certes classiques sur mais s’avère solide, monte doucement en tension au fil des pages et ne va pas manquer de surprises et de révélations qui vont rendre le récit encore plus prenant. La narration à la première personne joue aussi beaucoup dans l’aspect immersif du récit. Concernant l’univers il est très intéressant à découvrir, que ce soit aussi bien dans son aspect technologique qu’à travers son évolution sociale et politique. Il va ainsi nous questionner et nous faire réfléchir sur de nombreux points comme l’importance de la technologie dans nos vies, la notion de vie privée, l’idée du travail, l’esclavage ou encore sur la notion de sécurité et de liberté. Le héros, Carlos, ne manque pas de se révéler intéressant à suivre et à découvrir à travers sa vision du monde, sa vie mais aussi sa quête. Je regretterai juste un côté froid, distant dans le personnage principal, qui n’enlève en rien à ses qualités, mais le rend distant à croire que chaque interaction doit reposer sur une manipulation. Concernant les personnages secondaires ils s’avèrent solides et percutants, même si j’aurai aimé que certains soient un peu plus développé. Au final je regretterai une ou deux facilités par moment, mais surtout une fin qui, sans manquer de qualité, m’a paru traité la problématique concernant Carlos de façon un peu précipitée et facile, comme si l’auteur manquait de pages. Cela n’a pas empêché pour autant ce roman de m’offrir un très bon moment de lecture, bien porté par une plume vive, soignée et entraînante. Je lirai sans soucis d’autres écrits de l’auteur.

 

Ma Note : 7,5/10

 

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  1. Il a l’air assez différent de Planetfall comme texte. Je suis curieuse de le lire ceci-dit.

    • Il l’est même si on y retrouve des thématiques similaires(comme la notion d’être connecté). Je te souhaite une bonne lecture en tout cas.

  2. En gros il me reste à encore le meilleur, j’ai bien fait de commencer par celui-ci 😀 Merci pour le lien 🙂

  3. J’avais bien aimé Planetfall et celui-ci est prévu prochainement. Ta chronique m’a encore donné plus envie de le lire. 🙂

  4. Je vais déjà commencer par Planett fall et si cela me séduit, celui-ci sera donc au programme. Merci!

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