Mers Mortes – Aurélie Wellenstein

Résumé : Les humains ont massacré les mers et les océans. L’eau s’est évaporée ; les animaux sont morts.
Quelques années plus tard, les mers et les océans reviennent. Ils déferlent sur le monde sous la forme de marées fantômes et déplacent des vagues de poissons spectraux, tous avides de vengeance. Les fantômes arrachent leurs âmes aux hommes et les dévorent. Bientôt, les humains eux aussi seront éteints… Leur dernier rempart face à la mort : les exorcistes.
Caste indispensable à l’humanité, les exorcistes sont bien entendu très convoités.
L’un d’eux, Oural, va se faire kidnapper par une bande de pirates qui navigue sur les mers mortes à bord d’un bateau fantôme.
Voilà notre héros embarqué de force dans une quête sanglante et obligé, tôt ou tard, de se salir les mains…

Edition : Scrinéo

 

Mon Avis : J’ai découvert Aurélie Wellenstein il y a quelques années maintenant, avec son premier roman : Le Roi des Fauves. J’avais passé un très bon moment, le livre offrant une histoire assez simple dans les grandes lignes, mais qui ne manquait pas de se révéler prenante, incisive et percutante. Depuis je n’ai raté quasiment aucune nouvelle publication de l’autrice, qui m’ont toujours accroché, offrant à chaque fois des récits sombres et efficaces. C’est donc sans surprise que je me suis laissé tenter par son tout dernier roman : Mers Mortes. Concernant la couverture, illustrée par Aurélien Police, je la trouve, comme souvent avec le travail de l’illustrateur, franchement magnifique.

Ce roman nous plonge dans un futur lointain où, à force de ne rien faire pour préserver la planète, les mers, les océans, ainsi que tout l’écosystème marin, ils ont complètement disparu face au réchauffement climatique. La planète est ainsi devenue un véritable désert invivable. Pire, les animaux disparus reviennent maintenant sous la forme de spectres pour se venger des Hommes. Seuls les exorcistes peuvent encore défendre les derniers humains. Oural en est un. Un jour la vie de ce dernier va pourtant basculer quand des pirates vont le kidnapper. Une fois la dernière page tournée, je dois bien admettre que ce roman a encore réussi le pari de me faire passer un bon, voir un très bon moment de lecture. Certes il se base souvent sur des aspects assez simples dans les grandes lignes, mais qui, ensemble sous la plume d’Aurélie Wellenstein, fonctionnent parfaitement bien pour offrir un récit plus que solide et qui ne laisse pas indifférent. Ainsi l’autrice reprend un peu la construction habituelle de ses romans, avec un héros (ou groupe de héros) qui va par la force des évènements devoir se lancer dans des aventures qui les dépassent et vont les transformer. Ils vont aussi rencontrer des gens aux visions, aux vies, aux idées souvent complètement différentes et surtout découvrir un monde plus complexe que prévu.

Cette construction s’avère ainsi, toujours aussi solide. La grande force du roman vient clairement de son rythme, qui se veut nerveux de la première à la dernière page et montant en tension au fil des pages. En effet, à peine le temps de découvrir cet univers très post-apocalyptique, qu’on se retrouve rapidement emporté par le maelström de péripéties, d’action et d’aventures que vont rencontrer les héros. C’est vif, prenant et pour autant le récit n’oublie pas d’être percutant devant les nombreuses péripéties qu’ils vont rencontrer et un minimum intelligent dans les thématiques qu’il cherche à soulever. On se retrouve ainsi rapidement accroché et entraîné par ce que propose l’autrice. On y trouve toujours aussi cet aspect sombre, violent qui est souvent présent dans ces romans, dans cette quête de « liberté », cette idée que le changement, l’évolution, la transformation etc.. ne peut pas se faire sans un minimum de sacrifices, de souffrances. Surtout, à chaque fois, ce côté sombre n’est pas gratuit, il apporte clairement quelque-chose, selon moi, dans la construction de l’univers et des personnages, il a une utilité. Il faut dire aussi que la toile de fond qui nous est décrite ici est loin d’être idyllique.

On plonge ainsi dans un monde qui n’est pas sans rappeler certains post-apo comme Mad Max d’un point de vue visuel, avec cette absence totale d’eau, l’apparition de désert qui ont en majorité recouvert la planète entière. Il y a un côté sauvage qui se dégage de ce monde, même s’il est un peu frustrant par moment de ne pas le voir plus développer. On ne peut pas nier non plus le travail d’imagination d’Aurélie Wellenstein dans toutes les idées et constructions qu’elle propose, que ce soit avec les fantômes, les pirates, les âmes, les transformations etc.. Maintenant il faut savoir que l’on plonge dans un univers qu’il faut accepter tel quel, il n’y a pas d’explications concernant les fantômes, l’apparition d’exorciste, ce n’est pas ce que cherche l’autrice ici. Cela pourra en déranger certains mais, pour ma part, avec un tel format, le côté nerveux et saisissant et surtout le travail mené sur les personnages, tout cela vient compenser en grande partie ce manque d’explications. De même le but de cet univers n’est pas d’être cohérent avec le nôtre, il en est un reflet teinté d’imaginaire, on n’est ainsi pas dans un monde de Cli-Fi, mais plus dans un monde qui cherche à faire réagir. J’ai aussi été un peu frustré de ne pas en apprendre plus sur ce monde extérieur, le récit se concentrant sur le duel entre les deux héros, mais rien de non plus dérangeant. Au final un univers certes simple, mais qui fourmille d’idées et ne manque pas de s’avérer solide, efficace et de bien coller au récit, offrant une toile de fond visuellement prenante et entraînante.

Concernant les personnages, Oural et Bengale se dégagent franchement du récit. L’un et l’autre sont des fortes têtes et offrent clairement des personnages complexes dans leurs évolutions, dans leurs visions, dans leurs actes, leurs peurs et leurs envies. L’intérêt vient clairement de leurs rencontres, des effets qu’elle va avoir sur les deux protagonistes, la façon dont ils vont devoir gérer cette nouvelle relation, leurs clashs et la façon dont ils imaginent le monde, les autres ou encore les sacrifices à faire. Je trouve que l’autrice arrive toujours, au fil de ses récits, à construire des relations ambiguës, prenantes , dérangeantes voir captivantes entre les deux protagonistes principaux, oscillant entre amour et haine, loin d’une relation classique, mais qui pourtant ne manque pas de se révéler cohérente, marquante. D’une certaine façon elle amène toujours une complexité bienvenue, qui fait que le gentil n’est pas si gentil que cela, et que le monstre n’est pas simplement qu’un monstre. On peut les apprécier comme les détester pour ce qu’ils sont, ce qu’ils font, mais pour autant on les comprend, on voit le cheminement qu’ils prennent. Ce qui est dommage c’est que finalement, lié au format aussi, les autres personnages restent en retrait, alors qu’il y avait la possibilité pour certains d’être plus développés tant ils avaient du potentiel. Ils ne sont pas mauvais, chacun possède un peu son propre background, mais voilà on a l’impression de ne rester qu’en surface, surtout vu le travail fourni sur les deux héros principaux.

Un autre point vient intéressant vient de la thématique environnementale du récit. Alors, je ne vais pas vous mentir, on est dans le message qui cherche à choquer, percuter, il ne cherche pas obligatoirement la finesse et se sert parfois de grosses ficelles, mais cela ne l’empêche pas de fonctionner. Par contre, j’ai aussi trouvé, même si je m’y attendais vu que j’en avais discuté avec l’autrice, que la construction de ce roman est un peu la même que celle de ses autres romans, avec ce principe de plusieurs parties d’action / réaction. Pour autant, cela m’a un peu moins dérangé que dans Le Dieu Oiseau, le conflit entre les deux héros offrant un chouïa plus d’intensité atténuant légèrement ce sentiment. Je suis par contre un peu frustré par certains aspects qui sont traités un peu trop rapidement par moment, que ce soit dans la psychologique comme dans la thématique environnementale du bouquin. Maintenant, pour autant cela ne m’a pas empêché de passer un bon moment de lecture avec ce livre, bien porté par une plume vivante, percutante et efficace. Je continuerai à lire les romans de Aurélie Wellenstein avec plaisir.

En résumé : J’ai passé un bon moment de lecture avec ce roman qui nous plonge dans un univers post-apo ou les mers et l’ecosystème marin ont complètement disparus et où les animaux reviennent se venger sous forme de spectre. Ce que j’aime toujours avec les romans de l’autrice c’est qu’elle se base souvent sur des constructions et des idées simples, mais solides, et elle construit un récit efficace, qui ne manque jamais de se révéler nerveux et percutant. J’ai ainsi été rapidement captivé tournant les pages avec l’envie d’en apprendre plus, la tension montant au fil du récit. L’univers s’avère solide dans sa représentation et ne manque pas de fourmiller d’idées, même si parfois il reste un peu en surface tant on aurait aimé en apprendre plus. Autre point qui pourra en déranger certains, même si pour ma part ça ne m’a pas bloqué, le fait qu’on est dans un univers qu’il faut accepter tel quel, ne cherchant pas à expliquer les choses, plus à faire réagir. Concernant les personnages j’ai trouvé le duo de héros très intéressant, complexe et efficace, leur dualité est le point central du récit, leurs visions différentes du mondes et leurs idées de changement. Dommage que les personnages secondaires, même s’ils ne sont pas mauvais, soient un peu effacés. La thématique environnement ne cherche pas la finesse, mais fonctionne bien à travers un côté percutant et marquant. Je regretterai par contre une certaine répétition de l’autrice dans sa construction de ses romans ainsi que certains aspects traités un peu trop rapidement, mais rien de bien gênant. La plume d’Aurélie Wellenstein est vivante, percutante et efficace et je lirai sans soucis ses autres romans.

 

Ma Note : 8/10

 

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  1. J’aime beaucoup cette autrice, j’ai lu d’elle le Roi des fauves et le Dieu Oiseau qui est très bon aussi ! Celui a l’air aussi fort sympathique, je le rajoute direct à la liste de mes envies de lectures 😀

  2. Aurélie Wellenstein est une autrice que j’aime beaucoup malgré un goût de « trop peu » à chaque roman d’elle que j’ai lu jusqu’à présent. « Mers mortes » est un titre que je vois tourner de blog en blog avec son lot d’avis très positifs, et plus ça va, moins j’ai de patience quant à l’arrivée prochaine de l’autrice en Belgique ! x) J’espère pouvoir discuter de ce livre avec elle avant de le lui acheter.
    Merci pour ton retour qui me convainc encore un peu plus de me jeter dedans ! J’ai hâte de découvrir le duo Oural/Bengale et espère ne pas rester sur ma faim.

    • Après ce côté « trop peu » est un peu la force de l’autrice d’une certaine façon, cela lui permet d’aller directement à l’essentiel, de construire son récit de façon plus incisive, même si je te rejoins parfois on attend un peu plus.
      Je te souhaite une bonne lecture alors 🙂

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