Port D’Âmes – Lionel Davoust

port d'amesRésumé : Rhuys ap Kaledán est un héritier déchu.
Tout juste libéré de la servitude et des galères, il rejoint la cité franche d’Aniagrad, où tout se vend et tout s’achète, pour reconquérir l’honneur de sa famille. L’occasion lui en est rapidement donnée : Edelcar Menziel, un ancien ami de son père, lui propose de travailler sur la conversion dranique, un procédé perdu depuis des siècles qui permettrait de réaliser des machines magiques. Résolu à tracer son chemin dans la haute société de la ville, le jeune homme s’investit de tout son cœur dans le projet.
Mais bientôt, coincé entre des intrigues politiques et son amour pour une mystérieuse jeune femme qui vend des fragments de son âme pour survivre, Rhuys découvre que le passé recèle des secrets bien sombres et tortueux. Aux prises avec l’ambition, la duplicité et le mensonge, il devra se montrer plus rusé que ses ennemis s’il veut atteindre son but sans perdre son âme.

Edition : Critic

 

Mon Avis : Il y a un an l’auteur publiait La Route de la Conquête, un recueil de nouvelles prolongeant la plongée du lecteur dans l’univers d’Evanégyre découvert lors de ma lecture de La Volonté du Dragon. J’avoue ne pas avoir été déçu par la découverte de cet univers fascinant, dense offrant un mélange passionnant de technologie et de magie, le tout porté par des récits intelligents et soignés. Par conséquent quand il fût annoncé qu’un roman allait être publié par l’auteur dans ce monde, je savais qu’il allait très rapidement entrer dans ma PAL. Mais même sans ces arguments, la magnifique couverture, illustrée par François Baranger, m’aurait obligatoirement fait pencher sur ce livre. Alors attention si vous lisez cette chronique je risque de spoiler, non pas ce livre, ce que j’essaie d’éviter au maximum, mais plus l’univers d’Evanégyre, principalement des informations qu’on retrouve dans La Route de la Conquête sur la chronologie. A noter qu’il n’est pas nécessaire d’avoir lu ses précédents récit dans cet univers pour se plonger dans ce roman, car comme ses textes précédents ils peuvent tous se lire indépendamment.

Ce roman est situé dans une période très lointaine dans le futur de l’univers d’Evanégyre que l’on connait. Dans son précédent recueil, face à sa suffisance, l’Empire d’Asreth c’était finalement éteint, amenant les Âges Sombres ainsi qu’une forte régression aussi bien technologique que sociale. Ici on se retrouve encore bien des années plus tard, les Âges Sombres s’éteignent, la technologie Asreth a complètement disparue et l’Empire est devenue un simple mythe, une légende qu’on raconte comme une fiction. On découvre ainsi Rhuys ap Kaledán, noble déchu, qui revient, après 8 ans de servitude, à Aniagrad espérant y retrouver tout ce qu’il a perdu. Il va très rapidement se rendre compte que rien n’est gratuit.

Première chose qui surprend, c’est le changement radical dans l’univers, on quitte ainsi l’Empire d’Artech et son univers carré, avec son but unique que tout le monde suivait malgré quelques dissensions, il ne faut pas l’oublier, pour un futur qui est d’une certaine façon plus pernicieux, où la guerre va faire son grand retour, où les mensonges, les complots et les trahisons influencent fortement la vie des uns et des autres. Aniagrad en est d’ailleurs le parfaite exemple, la ville où on peut tout acheter, où tout est déclaré et où le contrôle se fait avec une poigne de fer par l’administration et sa milice. Une ville de liberté, mais où on se rend rapidement compte qu’elle est construite comme une toile d’araignée dont on peut très vite tomber dans ses filets et se retrouver acculer. Cela ne veut pas dire que l’Empire et sa technologie a complètement disparu, on le croise, en ligne de fond, à travers des récits, des légendes, des recherches, il va avoir une place dans l’intrigue, mais est loin d’en être le point central. La description de ce monde par l’auteur se révèle dense, soignée, sans non plus se révéler trop lourde ou ennuyeuse, on a l’impression de se plonger dedans, de visiter cette ville pittoresque et hétéroclite, à la fois pleine de surprise, de beauté, mais aussi d’ombre, d’exclusion, de violence. Alors ce changement peut surprendre, si vous êtes habitué aux machines Asreth, mais finalement se révèle très intéressant, permettant ainsi de varier son histoire et aussi d’éviter d’ennuyer le lecteur en racontant toujours la même chose. L’idée du transfert, qu’on avait, d’une certaine façon, déjà découvert dans une autre nouvelle, offre ici quelque chose que j’ai trouvé de très poétique et mélancolique, avec ce besoin de ressentir des émotions ou, selon certains, de les faire disparaitre.

L’intrigue n’est pas non plus en reste par rapport à l’univers, elle se révèle ainsi clairement captivante, offrant tout du long un jeu de manipulation, de pouvoir et de trahisons qui se révèle franchement accrocheur et efficace, tout en se gardant aussi un aspect plus intimiste par l’entremise du personnage principal qui apporte ainsi une touche plus émotionnelle, au plus proche du héros, qui permet de se retrouver facilement happer par les nombreuses aventures qui vont lui arriver. Alors certes, l’histoire et l’univers donne une impression de Fantasy plus classique, mais cela n’empêche pas l’auteur de montrer qu’il s’en sort très bien en nous offrant un récit qui se révèle captivant et entrainant, le tout à un rythme qui monte lentement en tension au fil des pages, des révélations et de l’évolution du personnage principal dans cette quête identitaire qui ne va pas le laisser indemne et le pousser à se remettre énormément en question, oscillant entre amour, naïveté et souffrance. Le récit joue ainsi avec le lecteur pour mieux le surprendre, lui offrir rebondissements et machinations, mais qui aussi n’oublie pas de soulever quelques réflexions intéressantes et efficaces. Que ce soit concernant l’identité, la souffrance, la liberté ou encore sur le jeu des classes sociales et du pouvoir, on ne peut s’empêcher de se poser des questions sur ce qui nous est montré, même si parfois présenté de façon un peu facile. En tout cas une intrigue bien ficelée, maîtrisée, prenante par son ambiance pleine de mystère et de mensonges.

Concernant les personnages il faut bien avouer que je me suis rapidement attaché à Rhuys, jeune homme pleins d’idéaux, d’honneur et de rêves, qui va rapidement se rendre compte que le monde est loin de ce qu’il imaginé, qui va, d’une certaine façon prendre une claque et que pour changer les choses il faut parfois savoir sacrifier certaines choses. Son évolution au fil des pages se révèle captivante, soignée, accrocheuse et surtout réaliste, tant on se retrouve proche de lui dans la façon dont cela nous est présenté. Alors certes je l’admet, parfois on se pose quelques questions, pour un personnage qui a passé 8 ans dans la marine, il apparait un peu naïf dans certaines situations, mais bon rien de bien méchant. Surtout la façon dont il va grandir, passer d’une certaine façon de l’adolescent innocent, à l’adulte s’avère efficace et prenant. Concernant les personnages qui gravitent autour de lui ils se révèlent denses, soignés, offrant une palette large de personnages humains avec leurs bons et leurs mauvais côtés, leurs ambitions et leurs souffrances, avec une mention toute particulière pour la vendeuse, héroïne mystérieuse, torturée, fougueuse, charismatique qui prend son temps pour se dévoiler et surtout prend une place de plus en plus importante dans le récit. Elle vient ainsi apporter une touche de poésie supplémentaire à l’ensemble. La complexité de la relation qu’elle va nouer avec Rhuys est aussi captivante, par ce jeu qui se nous entre ces deux protagoniste, d’une certaine façon semblables, mais pourtant si différents dans leurs visions.

Je ne relèverai que deux points qui m’ont légèrement laissé perplexe, le premier vient de quelques longueurs que j’ai ressenti, rien de bien méchant, ni dérangeant, mais j’ai eu l’impression que l’auteur tirait un peu certains passages, principalement avant certaines révélations. L’autre point est un peu plus, on va dire, personnel et vient d’une des révélations finales que j’ai vu arriver très tôt, ça n’empêche en rien de savourer ce récit ni de l’apprécier vu que cette révélation n’est que secondaire, l’important venant surtout des conséquences, mais ça m’a laissé un léger sentiment de frustration. Rien de bien méchant non plus tant l’ensemble s’avère plus qu’efficace toujours aussi bien porté par une plume fluide, travaillée, prenante et qui happe, je trouve, assez rapidement le lecteur. Au final Port d’Âmes offre une nouvelle vision réussie d’Evanégyre, et me donne encore envie d’en découvrir plus sur cet univers. C’est bien car je crois avoir vu que son prochain récit dans cet univers serait une trilogie.

En Résumé : J’ai passé un très bon moment de lecture avec cette nouvelle intrusion dans le monde d’Evanégyre, qui se situe, d’un point de vue temporel, dans une époque complètement différente de l’Empire d’Asreth. On se retrouve plonger ainsi dans une histoire qui peut, aux premiers bords paraitre classique, mais qui est maîtrisée, captivante mélange de mensonges, de trahisons, de manipulations et de jeux de pouvoir et qui n’oublie pas aussi de pousser le lecteur à se poser des questions. L’univers, se révèle dense, soigné, nous présentant la ville d’Aniagrad qui oscille entre ombre et lumière et qui donne envie d’en apprendre plus tant elle se révèle tortueuse. On s’accroche très rapidement au personnage principal de Rhuys, naïf adolescent qui va, par la force des choses entrer dans le monde adulte avec tout ce que cela entraine. Les personnages qui gravitent autour de lui se révèlent eux-aussi très intéressants à découvrir, avec une mention spéciale pour la vendeuse, héroïne passionnante, vivante et charismatique, apportant une touche de poésie. Je ne relèverai que deux points, le premier est que j’ai ressenti quelques longueurs, mais rien de vraiment dérangeant tant on est pris dans l’intrigue. Le second vient d’une révélation que j’ai vu venir très rapidement, rien de non plus dérangeant vu que l’intérêt vient des conséquences qu’elle amène, mais tout de même légèrement frustrant. La plume de l’auteur se révèle travaillée, captivante et fluide, nous plongeant avec facilité de nouveau à la découverte d’Evanégyre dont je lirai sans soucis d’autres écrits.

 

Ma Note : 8/10

 

Autres avis : Dionysos, …

Précédent

Structura Maxima – Olivier Paquet

Suivant

Mes Achats du Mois d’Août 2015

  1. je me le note, merci pour la découverte 😉

  2. Ca m’a bien donné envie de découvrir d’autres livres dans ce monde !

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

© 2010 - 2024 Blog-o-Livre