Rouille – Floriane Soulas

Résumé : Paris, 1897. Les plus grandes puissances européennes se sont lancées à l’assaut de la Lune et de nouveaux matériaux découverts sur le satellite envahissent peu à peu la Terre. Ces grandes avancées scientifiques révolutionnent l’industrie et la médecine, mais pas pour tout le monde. Et dans les faubourgs, loin de l’hyper-centre protégé par le dôme sous lequel vivent les puissants, le petit peuple de Paris survit tant bien que mal. Violante est une prostituée sans mémoire, ignorant jusqu’à son âge réel. Dans un monde où son désir de vérité passe après celui de ses clients et de ses patrons, la jeune fille tente de retrouver la trace de ses origines perdues. Alors qu’une vague de meurtres particulièrement horribles ensanglante la capitale, Satine, son amie et seul soutien, disparait dans d’étranges circonstances. Violante, elle, se voit offrir une porte de sortie à ce demi-monde violent qui la retient prisonnière, mais décide malgré tout de prendre part aux investigations.

Edition : Scrinéo

 

Mon Avis : J’avoue, honte à moi, je pensais découvrir l’autrice avec ce roman et c’est lorsque j’ai commencé à écrire cette chronique que je me suis rendu compte que j’avais déjà lu une nouvelle d’elle dans l’anthologie Ex-Machina. Comme quoi ma mémoire des noms est toujours aussi mauvaise. Concernant ce roman j’en entends parler depuis quelques mois maintenant, je crois depuis l’annonce de l’autrice de sa publication chez Scrinéo qui m’avait été relayée. Je me suis ainsi retrouvé à suivre de loin les avancées du projet, intéressé par le sujet de ce roman de fantasy Steampunk. Sauf que voilà, malgré la magnifique couverture d’Aurélien Police, je ne savais pas trop si j’allais me laisser tenter, ayant un peu peur de trouver un roman qui annonçait pas mal de bonnes choses, mais qui ne répondait pas obligatoirement à ce que je peux rechercher. Une discussion avec l’autrice lors des dernières Imaginales m’a tout de même convaincu de lui laisser une chance et de me faire mon propre avis.

Ce roman va ainsi nous faire découvrir Violante, une jeune prostituée qui a perdu la mémoire et fait tout pour la retrouver. Son destin va basculer un jour, lorsque des meurtres de plus en plus sordides sont menées dans les rues de Paris sur des prostituées et des orphelins, et que l’une de ses seules amies va disparaitre. Elle va alors tout tenter pour la retrouver. Concernant ce roman, je dois bien admettre que finalement je suis un peu passé au travers. Je ne remets pas en cause l’autrice ou son récit, au vu des premières critiques le roman a l’air d’avoir trouvé son public, je pense tout simplement que je n’étais pas le public cible de ce livre. En fait, l’impression que j’en avais, c’est de lire un roman qui ne savait pas trop où se placer, qui n’arrivait pas à trouver le bon ton et qui, pour moi, ne restait qu’en surface des choses. Si on prend par exemple le côté sombre de ce Paris que construit l’autrice, l’ensemble est contrebalancé par des personnages à la psychologie qui n’ont pas paru me paraitre coller avec l’ensemble. Cela donne l’impression de dire « bon je fais du sombre, mais pas trop pour peut-être éviter de choquer ou bloquer le lecteur ». Franchement en lisant ce récit j’ai eu cette impression de découvrir Princesse Sarah (l’animé) steampunk et dans un univers un peu sombre (ressenti en accord aussi avec la Marmotte qui a lu le livre, mais qui, pour information, l’a un peu plus apprécié que moi), avec cette envie de construire un truc réaliste, percutant, glauque, mais avec tellement de bons sentiments que l’ensemble devient un peu incohérent, voir improbable.

Déjà commençons par l’intrigue, on ne peut pas lui enlever son côté fun et, d’une certaine, façon entraînante tant l’ensemble est amené tout de même de façon fluide. Floriane Soulas nous offre ainsi de nombreux rebondissements et de nombreuses scènes d’actions énergiques, ce qui fait qu’on se retrouve à se laisser un minimum porté par le rythme soutenu du récit. On est clairement dans cette idée d’un récit sans trop de prise de tête, qui en met plein les yeux avec son lot de révélations et de rebondissements. Maintenant soyons clairs, le fil rouge utilisé de l’héroïne qui voit sa meilleure amie disparaitre ce qui va la pousser a devoir enquêter pour trouver la vérité, ou bien encore celle du personnage principal amnésique sont des tropes énormément connus et usités, ce qui rend l’ensemble au final très, voir trop, prévisible. Attention, l’autrice ne les utilise pas mal, loin de là, mais à force des les avoir vus dans d’autres romans et se révélant utilisé, dans ce roman, de façon très classiques, je n’ai jamais été surpris par aucune des révélations que cherche à amener le récit donnant cette impression que tout est balisé. Que ce soit le tueur, le commanditaire, le médaillon, la Rouille ou bien encore les motivations de chacun j’avais rapidement tout deviné. C’est un peu dommage car même si cela n’empêche pas l’histoire d’être cohérente et un minimum construite, obligatoirement quand à la moitié du livre tu en connais la fin, tu accroches moins.

En ce qui concerne l’univers, comme je l’ai dit, je suis un peu mitigé par son incapacité à clairement trouver son juste milieu. Oui, la vision de Paris possède ce petit côté un peu « sale », sombre, violent montrant que la Belle Epoque est loin d’être un rêve ou un fantasme, que la vie était compliquée, que le crime était de mise, que des enfants vivaient dans la rue et mouraient sans que cela ne dérange personne. Oui la prostitution est loin d’être un milieu de rêve (de tout temps d’ailleurs) avec sa violence, sa souffrance, ses maladies et tout ce qui peut en découler. Il y a un même un côté très sanglant, limite angoissant avec cet assassin et ses mutilations. Ça c’est le côté intéressant de l’univers, maintenant, pour ma part, l’univers perd de sa crédibilité à mes yeux car les personnages n’entrent pas dans le moule de ce que crée l’autrice. Que ce soit Violante, l’héroïne, qui pour rappel est une prostituée, soit le niveau le plus bas de l’échelle dans ce milieu, mais qui pourtant envoie se faire voir régulièrement sa matrone ou son proxénète sans aucune conséquence. Elle sort tellement souvent sans surveillance qu’on a l’impression qu’elle ne vit pas dans une maison close. D’un autre côté il faut savoir que le réseau de prostitution est tenu par une bande composée de trois personnes : Léon, Jules et Surin. Le plus grand réseau de maison close de Paris ne repose littéralement que sur trois gars, c’est à se demander comment il peut être encore debout. Pareil on a tout du long notre héroïne qui nous parle de la dure condition du milieu, forcée à coucher avec des hommes pour faire fonctionner un milieu vérolé avec son système de dettes, sauf qu’on se demande pourquoi elle ne part, pas vu que clairement durant tout le bouquin elle fait ce qu’elle veut. D’ailleurs en parlant de cette idée de dette, je suis assez fasciné par le fait qu’à un moment ils auraient pu se faire encore plus d’argent avec Violante et des défilées et ça n’intéresse personne.

C’est cette impression de passer à coté de certaines choses, de ne pas aller au bout des idées et des thématiques développées qui m’ont frustré je trouve. Il y a pourtant du potentiel dans cet univers, que ce soit dans son aspect Steampunk, son idée d’imaginer la conquête de la Lune, ses technologies et son imagination ou encore dans la représentation qui en est faite, sauf que voilà j’ai toujours eu l’impression d’être dans une esquisse de monde. Une simple toile de fond vaguement présente selon les besoins. Cela se ressent d’ailleurs bien à travers la représentation de la ville de Paris qui donne pourtant envie d’en apprendre plus, mais ne reste finalement dévoilé que dans de très très grandes lignes où la conquête de la Lune qui n’est jamais expliquée. Pour ma part j’ai besoin d’un peu plus pour me retrouver emporter dans un monde, j’ai besoin un minimum d’en assimiler les mécaniques. Concernant les personnages, je ne vais pas dire qu’ils sont mauvais dans leurs constructions, ce serait mentir, mais entre le fait qu’ils ne collent pas franchement à l’univers et l’époque développée, ou parfois l’impression qu’ils sont un peu trop archétypes, il n’ont jamais réussi à complètement me passionner. Que ce soit par exemple Violante dans son rôle d’Orpheline sans mémoire trop facilement prévisible, trop forte tête pour sa position et son époque, Léon le patron du réseau de prostitution qui parait surtout être un gars au grand coeur qui n’a pas, mais alors pas du tout le profil du grand caïd du coin qu’on se demande comment il peut être encore là, ou bien encore Jules qui doit attendre la naissance de James Bond pour enfiler sa tenue de Q, tous les personnages détonnent de trop dans ce récit à mon goût. Alors bien entendu cela dépendra de chacun, ce côté détonnant offrant quelque chose de différent et peut-être aussi une certaine tension, une certaine originalité et une impétuosité supplémentaire, mais voilà pour ma part je n’ai jamais réussi à franchement m’attacher à eux. Par contre les personnages secondaires ne servent clairement qu’à faire avancer l’intrigue pour disparaitre tout aussi vite, ce qui est un peu dommage.

J’ai aussi eu un léger soucis avec l’aspect logique et scientifique de ce récit, mais là c’est clairement une attente plus personnelle pour en avoir discuté avec la Marmotte. J’attends ainsi que l’ensemble soit d’une certaine façon cohérent avec l’univers construit et si l’univers est simplement parallèle au notre une certaine cohérence scientifique. Je peux accepter des idées improbables si on me dit que c’est cohérent avec le récit. Sauf qu’ici certains points m’ont dérangé, soit parce qu’il me paraissaient ne pas tenir la route, soit parce que justement l’univers était trop esquissé pour m’offrir de réponse. Un exemple, on a trouvé sur la Lune un matériau « magique », pourquoi alors qu’on a colonisé la Lune, mettre des Fonderie à Paris alors que ce serait moins énergivore et moins couteux de le faire directement sur la Lune. Et encore, là je ne parle que de celles que je peux parler sans spoiler. J’ajouterai aussi quelques longueurs et quelques scènes qui m’ont paru inutiles. Je ne vais pas continuer, je pense que vous avez compris que je suis sorti avec un sentiment mitigé de ce roman, qui, pour moi, avait du potentiel et de bonnes idées, mais qui, au final, ne correspond pas du tout aux attentes que je pourrai avoir d’un récit, tout simplement.

C’est un simple rendez-vous manque entre ce Rouille et moi, car je ne doute pas qu’il devrait trouver son public. Franchement si vous cherchez un récit ou l’intrigue va vite, avec un côté un peu sombre mais pas trop et qui fait la part belle au rythme et aux scènes d’aventures, alors vous devriez apprécier. Je laisse bien entendu à chacune se faire son propre avis, mon avis, même si mitigé, n’est pas là pour vous bloquer, comme je l’ai toujours dit une lecture repose sur des attentes, ici les thématiques, que ce soit en terme de logique ou de noirceur, l’univers ou encore les personnages ne m’ont tout simplement pas convaincu. Concernant la plume de l’autrice je l’ai trouvé plutôt entrainante, efficace, même si un travail de relecture aurait quand même dû être fait pour quelques fautes (trouvées par la Marmotte) et aussi un soucis de typo avec des dialogues qui ne reviennent pas à la ligne ce qui est un peu dommage.

En Résumé : Je ressors au final avec un sentiment mitigé concernant la lecture de ce roman qui n’a pas réussi à répondre aux attentes que je pouvais avoir. Pourtant il y a du potentiel dans ce livre, il y a aussi de bonnes idées, mais voilà, pour ma part, j’ai trouvé qu’il restait trop en surface et surtout était parfois trop en décalage. Je prends pour exemple l’univers qui, certes, possède ce petit je ne sais quoi de sombre, de « sale », de violent, mais qui pourtant est contrebalancé par des personnages qui n’entrent pas dans le moule de cet univers paraissant complètement décalés. La toile de fond ne manquait pourtant pas d’attrait, avec ce Paris Steampunk, cette idée de conquête de la Lune et autre, mais voilà il est beaucoup trop esquissé à mon goût ce qui m’a finalement plus frustré. L’intrigue n’est, en soit pas mauvais, maîtrisée et cohérente, mais voilà elle utilises des tropes tellement utilisés qu’elle en fut trop prévisible à mon goût, voyant arriver la fin à la moitié du livre. Concernant les personnages, je ne dirai pas qu’ils sont mauvais, loin de là, mais voilà entre le décalage qu’ils ont avec ce Monde et le fait qu’ils tombent trop dans des archétypes, ils n’ont pas non plus réussi à franchement m’accrocher. Par contre, concernant les personnages secondaires, j’ai trouvé un peu dommage qu’ils ne soient que de simples outils pour faire avancer l’intrigue. Après je regretterai aussi des aspects scientifiques soit improbables, soit reposants sur des vides qui m’empêche de les comprendre, quelques longueurs et quelques scènes inutiles ce qui m’a un peu frustré. Au final la lecture de Rouille fut simplement un rendez-vous manqué, je ne doute pas qu’il trouvera son public, se révélant fun, entraînant et pleine de rebondissements, je n’en étais tout simplement pas le public cible. La plume de Floriane Soulas est entrainante, efficace, même si un travail de relecture aurait quand même dû être fait par l’éditeur que ce soit pour les fautes ou les erreurs de typo.

 

Ma Note : 5/10

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  1. Je viens tout juste de le finir aussi 🙂 J’ai peut-être été un peu plus enthousiasmée que toi mais je partage la plupart des points négatifs que tu cites (notamment sur la différence entre la personnalité des personnages et le monde dans lequel ils vivent). Après j’ai quand même passé un bon petit moment 🙂

    • C’est pas mauvais je trouve, ça se laisse lire, mais j’ai tendance à me bloquer dès qu’il y a quelques points qui me dérangent ce qui joue obligatoirement sur mon ressenti.

  2. Finalement ce n’est pas plus mal que j’ai dû attendre pour l’avoir. Ça laisse le temps aux critiques d’arriver et notamment à celles moins dithyrambiques. J’aime bien avoir plusieurs sons de cloches. Le tien a le mérite d’être argumenté.

    Je lirai quand même ce Rouille par curiosité, un de ces jours.

    • J’espère qu’il te plaira plus qu’à moi. Tout va dépendre en fait des attentes que chacun peut avoir avec le roman.

  3. J’en entends beaucoup parler mais je n’ose pas me lancer. Il a l’air vraiment dur à lire au vu du résumé 🙂

    • Tout dépend de ce que tu attends dans un roman. Pour ma part je ne trouve Rouille pas si dur que cela et pas non plus si sombre, mais après sur ce point là ça dépendra vraiment de chacun.

  4. Même si ma note sera un peu plus élevée que la tienne, je te rejoins sur bon nombre de points. En fait, tu as mis des mots sur mon ressenti concernant l’univers ; je n’arrivais pas à m’expliquer ce qui me dérangeait. Finalement, c’est simple : les éléments sont suffisants pour en faire un bon roman steampunk, mais rien n’est approfondi, tout n’est que justification pour faire avancer l’histoire.
    Certains trouveront ça pertinent, car le monde dans lequel s’inscrit le récit n’est pas forcément ce qui les intéresse le plus, mais j’aime justement avoir l’impression de pouvoir m’y balader en tournant les pages, et ce ne fut pas le cas.

    Quant à l’histoire en elle-même, je n’y ai pas totalement cru non plus. Il y avait comme un décalage entre ce que l’on disait de Paris et ce que nos personnages vivaient. C’est exactement ce que tu as dit d’ailleurs : du sombre, mais pas tant que ça finalement…

    Enfin, Violante ne m’a pas convaincue à 100%. Elle est censée avoir reçu une éducation, mais ça ne se ressent pas dans son attitude. Certes, elle a perdu la mémoire, mais sa personnalité est en principe restée intacte.

    Ça fait beaucoup de petites incohérences, en fin de compte… Bref, je vais m’arrêter là, sinon je vais rédiger toute ma chronique en commentaire >.<

    • C’est un peu ça oui, on a l’impression d’un roman qui a le potentiel pour se révéler intéressant, mais qui, pour ma part, ne va pas au bout des choses. Je comprends parfaitement que cela plaise, le côté un peu simple, direct et énergique, mais moi j’ai besoin de plus.
      Je viendrai lire ta chronique quand tu l’aura écrite.

  5. Je l’avais repéré, mais je craignais un peu certains des points que tu soulignes. Je vais passer mon tour !

  6. Je viens de le finir et je suis un peu comme toi. J’ai bien aimé mais les personnages m’ont dérangé. Jules par exemple n’est pas du tout cohérent, on se demande ce qu’il fait dans le milieu où il évolue. Pareil pour Léon.
    C’est dommage car ça se lit vraiment bien. Mais il manque quelque chose.

    • Oui c’est un peu ça et même Violante elle ne me parait pas coller avec l’univers dans lequel elle évolue. Après oui il y a de bonnes choses dans ce livre, mais il aurait pu être tellement plus je trouve.

      • Oui c’est aussi vrai pour Violante mais ça s’explique par son amnésie on va dire. C’est surtout Léon et Jules qui m’ont dérangé, à la fin Jules c’est presque Mac Gyver.

  7. Je suis plus enthousiaste pour l’ensemble mais les proxénètes ne sont pas du tout crédibles, super sympas et tout, on a envie de s’en faire des potes ^^ mais bon, je les aime bien quand même, j’avoue qu’ils auraient dû mourir à la fin pour plus de crédibilité, les antibiotiques n’étaient pas de mise à cette époque

    • Pour moi même Violante m’a paru manquer de crédibilité, maintenant après le plaisir de lecture de chacun dépendra fortement de la capacité de chacun à accepter ou non ses aspects. je te rejoins pour les médicaments, rien qu’à travers la scène des égouts.

  8. Un peu plus enthousiaste que toi, mais il y a en effet de gros problèmes de cohérences au niveau des personnages, que ce soit au niveau de l’héroïne que des méchants proxénète pas méchants en fait…

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